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03 septembre 2018 | La Revue POLYTECHNIQUE 06/2018 | Énergie

De l’énergie renouvelable à partir d’acide formique

Des scientifiques de l’EPFL et de GRT Group ont construit une unité intégrée capable de produire de l’électricité à partir d’acide formique, au moyen d’une pile à combustible, de manière économique et efficace du point de vue énergétique. La machine est à disposition pour des démonstrations.

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), d’ici 2020, l’énergie propre coûtera l’équivalent, voire moins que les combustibles fossiles, tandis que les sources d’énergies renouvelables répondront à 40 % de la demande d’énergie globale d’ici 2040. Mais comme l’énergie renouvelable dépend du soleil et du vent, elle reste très peu fiable. C’est pourquoi la voie à suivre consiste à développer de nouvelles méthodes pour la stocker d’une manière qui permette de l’utiliser en fonction des besoins.

 
Diagramme montrant comment l’unité HYFORM-PEMFC fonctionne. (Crédit: EPFL/GRT Group)
 
 

Une pile à combustible nouvelle et intégrée
C’est là l’obstacle que la machine «HYFORM-PEMFC» vise à surmonter. Le projet est réalisé par GRT Group SA – une société qui se concentre sur la transition énergétique avec des solutions dans le développement du stockage de l’énergie – et le groupe de recherche du professeur Gabor Laurenczy à l’EPFL, qui a développé une pile à combustible nouvelle et intégrée à acide formique-hydrogène.
Cette machine utilise l’acide formique pour stocker l’hydrogène. Elle est destinée aussi bien à des applications domestiques qu’industrielles. Comparée à des appareils qui n’utilisent que de l’hydrogène, elle a été conçue pour assurer un bénéfice substantiel en termes de taille (un litre d’acide formique transporte 590 litres d’hydrogène), de facilité de transport, de sécurité et de coûts d’exploitation, tout en étant durable sur le plan de l’environnement.
Cette pile à combustible sera utile, notamment, pour les personnes qui se trouvent dans des régions n’offrant qu’un accès limité ou inexistant au réseau électrique, ainsi que pour celles qui développent des systèmes de transport d’hydrogène. L’unité est capable, par exemple, de fournir chaleur et électricité à un chalet alpin, avec un réapprovisionnement respectueux de l’environnement. Cette technologie peut également être transposée à plus grande échelle pour répondre aux besoins en électricité d’installations plus grandes, telles que des structures industrielles.
 
Un système complet et intégré
Pour GRT Group, la prochaine étape consiste à développer un système complet et intégré destiné à stocker de l’énergie renouvelable, comme l’électricité solaire excédentaire produite en été, qui pourrait ensuite être utilisée pour produire de l’électricité et de la chaleur à la demande en hiver, rendant ainsi les bâtiments autonomes sur le plan énergétique. Ce projet a pour but de démontrer les bénéfices économiques du concept et son potentiel réel au sein d’un système de stockage d’énergie intégré.
 
L’unité HYFORM-PEMFC peut produire 7000 kWh/an. (Photo ©EPFL_AlainHerzog)
 
 

Le contexte technologique
S’agissant de solutions de stockage de l’énergie renouvelable, l’hydrogène apparaît comme l’un des vecteurs d’énergie les plus prometteurs. Utiliser de l’hydrogène pour produire de la chaleur ou de l’électricité n’engendre pas d’émissions de carbone ni de particules, ce qui signifie qu’il n’a pas d’impact négatif sur l’environnement.
Le problème est que l’hydrogène offre une teneur en énergie très faible en volume. Il s’ensuit qu’il est très difficile à stocker et à transporter sous sa forme naturelle gazeuse, ou alors qu’il exige des pressions très élevées, des températures très basses et des infrastructures coûteuses, toutes choses qui ont un impact négatif en termes de sécurité et de coûts.
La solution alternative consiste à utiliser un vecteur d’hydrogène, tel que l’acide formique (HCOOH), qui constitue la combinaison la plus simple d’hydrogène et de CO2. L’acide formique est liquide aux conditions normales, facile à stocker, à transporter et à manipuler. Déjà produit à partir de sources renouvelables, il est largement utilisé dans l’agriculture, l’industrie du cuir, celle du caoutchouc, ainsi que dans les industries chimique et pharmaceutique.
Le défi, dès lors, est de récupérer l’hydrogène stocké dans l’acide formique d’une manière efficace du point de vue énergétique. C’est là que les catalyseurs entrent en jeu. Il s’agit de composés qui facilitent l’extraction de l’hydrogène de l’acide formique de manière qu’il puisse être ensuite converti en électricité au moyen d’une pile à combustible.
 
Le projet
L’appareil est constitué de deux parties principales: un reformeur d’hydrogène (HYFORM) et une pile à combustible à membrane échangeuse de protons (PEMFC). Le reformeur utilise un catalyseur à base de ruthénium pour extraire l’hydrogène, bien que les scientifiques développent en ce moment des catalyseurs basés sur des matériaux encore meilleur marché.
L’unité HYFORM-PEMFC peut produire 7000 kWh/an. Sa puissance nominale est de 800 W – à peu près l’équivalent de 200 smartphones en charge simultanément. Son rendement électrique est actuellement d’au moins 45 %.
Tant que l’acide formique utilisé est produit de manière durable, la pile à combustible est favorable à l’environnement et permet le stockage à long terme d’énergie renouvelable. Elle est silencieuse, émet un gaz propre, affiche un taux d’émission de dioxyde de carbone nul et ne produit ni particules, ni oxydes d’azote.
Par ailleurs, cette pile à combustible demande peu d’entretien et assure une performance du catalyseur stable et de longue durée. Sa technologie est applicable aussi bien dans les ménages, que dans les installations industrielles. Puisqu’il n’a besoin d’être alimenté qu’en acide formique, le système ne requiert aucune connexion à un réseau électrique, ce qui est particulièrement appréciable dans des régions retirées ou inaccessibles.
«La transformation chimique du CO2en des produits utiles devient de plus en plus importante, puisque ses taux dans l’atmosphère continuent à augmenter à cause des activités humaines», déclare Gabor Laurenczy. «C’est pourquoi produire de l’acide formique de manière durable – en utilisant le CO2comme vecteur d’énergie de l’hydrogène – est très important. La demande mondiale d’acide formique est en hausse, particulièrement dans le contexte des énergies renouvelables. Les vecteurs d’hydrogène et leur production à partir du CO2, soit par hydrogénation, par des bio-déchets ou par la biomasse, sont bien plus durables que les pratiques existantes», poursuit-il.
L’HYFORM-PEMFC est le résultat d’un projet cofinancé par l’Office fédéral de l’énergie et GRT Group.
 
À propos de GRT Group
GRT Group a été fondé en 1971 comme groupe de recherche centré sur le développement industriel de processus innovants développés dans les laboratoires de recherche de l’EPFL. Au fil du temps, la société a renforcé ses capacités en ingénierie et sa position financière, de manière à fournir des solutions industrielles dans l’environnement de l’économie circulaire. Elle se consacre à la solution de trois questions environnementales, en fournissant des solutions technologiques pour le présent et le futur: réduire les émissions de CO2, réduire la pollution par le plastique, permettre la transition énergétique. Elle est active dans le recyclage des plastiques en carburants et soutient la transition énergétique avec des solutions de développement du stockage de l’énergie.
GRT Group étend désormais ses activités à travers l’Europe. Elle est déjà présente en Italie et au Royaume-Uni.
 
GRT Group SA
1350 Orbe
Tél. 021 318 75 10

www.grtgroup.swiss

 
 
Prof. Gabor Laurenczy

Tél. 021 69 39858
gabor.laurenczy@epfl.ch
 
Nordahl Autissier
GRT Group SA
Tél. 021 318 75 10
info@grtgroup.swiss