Des abonnements
pour l'enrichissement
27 décembre 2017 | La Revue POLYTECHNIQUE 10/2017 | Génie civil

Décharge de Bonfol: la halle d’excavation a disparu

Le 25 août dernier, les grands arcs en acier de la halle d’excavation de la décharge de Bonfol ont été démolis au moyen de coupes pyrotechniques. En quelques secondes, la structure de la halle s’est effondrée de manière contrôlée. Quelques centaines de spectateurs ont observé cet évènement depuis une distance de sécurité. Les pièces en acier sont coupées en vue de leur recyclage.
Après une longue et minutieuse préparation, le 25 août 2017 à 11 h 07, les grands arcs de la halle d’excavation de la décharge industrielle de Bonfol, dans le canton du Jura, ont été démolis avec succès au moyen de coupes pyrotechniques. Trois signaux sonores brefs ont annoncé la mise à feu, suivis par le grand bruit de la première détonation. Celle-ci a coupé les tirants en acier massif qui tenaient les arcs sous tension en dessous du toit de la halle. Quand ils ont cédé, les arcs se sont détendus et ont poussé la construction latérale vers l’extérieur. Vingt-cinq millisecondes plus tard, une deuxième détonation a coupé, dans des endroits sélectionnés, les câbles de soutien du toit de la halle. Les arcs et la construction en acier se sont mis rapidement en mouvement, pour s’effondrer de manière contrôlée.

 
La halle de Bonfol juste avant la mise à feu des charges pyrotechniques.


Une transmission en direct sur grand écran
Une centaine de spectateurs ont observé cet évènement à une distance de sécurité depuis le Technoparc CISA. La société bci Betriebs-AG y avait installé un point d’observation qui permettait de voir au-dessus des cimes des arbres, la structure en acier blanc de la halle. Elle avait également organisé la transmission en direct sur grand écran des coupes pyrotechniques filmées par plusieurs caméras.
 
Des coupes pyrotechniques pour démolir les grands arcs
Avant d’effectuer les coupes pyrotechniques, la police et les pompiers ont installé une zone de sécurité de 500 m, parcouru la forêt autour de la décharge et barré toutes les routes et chemins d’accès. Une place d’atterrissage pour l’hélicoptère de secours de la Rega avait été prévue pour les cas d’urgence. Le ministre de l’Environnement jurassien, David Eray, les journalistes et les personnes invitées ont observé les coupes pyrotechniques depuis le côté sud de la décharge, derrière une palissade de protection installée à cet effet.
Le maître mineur de l’entreprise GU SprengTechnik AG, Walter Weber, est très satisfait du résultat. Il déclare: «Notre but était un démontage sûr, en coupant les différents éléments des arcs de la halle pour arriver à un effondrement le mieux contrôlé. Nous avons réussi». Michael Fischer, directeur de la société, souligne l’importance de cet évènement: «En 2008, cette halle unique de neuf arcs, d’une hauteur de 40 m, était le symbole visible du début de l’assainissement. Aujourd’hui, les déchets ont été excavés et cette construction peut disparaître. Une nouvelle étape de ce projet d’assainissement extraordinaire est franchie. Nous avons maintenant encore une année et demie de travaux pour démonter le reste des infrastructures.»
 
Les arcs de la construction s’effondrent de manière contrôlée.
 



Un projet unique en Suisse
C’est la première fois en Suisse qu’on démonte une construction en acier d’une telle dimension, au moyen de coupes pyrotechniques. C’est pourquoi le groupement DIB (Marti/Züblin), propriétaire de la halle, a engagé l’entreprise GU SprengTechnik AG pour détruire de manière contrôlée cette construction de plus de 2200 t d’acier.
Pour ce faire, l’équipe d’experts a attaché des charges à des endroits critiques pour la statique. La détonation de l’explosif contenu dans la charge fait monter la température du revêtement en cuivre de la charge, jusqu’à 4500 °C. Le plasma de cuivre, sous une pression de 150’000 bar, se déplace à une vitesse fulgurante contre le métal et découpe même de grands éléments en acier. Grâce à cette méthode, seulement 19 kg d’explosif ont dû être utilisés dans quarante-sept charges de coupe. En comparaison, lors d’un dynamitage dans une carrière de pierre, on doit utiliser plusieurs tonnes d’explosif.
 
Un important dispositif de sécurité
Une longue période de préparation a précédé les coupes pyrotechniques. Des calculs statiques complexes ont montré comment faire tomber la structure de manière prévisible. Des coupes pyrotechniques d’essai ont été effectuées pour pouvoir garantir qu’un minimum de pièces, comme des boulons ou des écrous, soient projetées. Lors de la préparation, des spécialistes de travaux en hauteur ont détaché les supports et les connexions en des points sélectionnés, pour affaiblir la construction en acier avant les coupes pyrotechniques.
Walter Weber explique: «Lors d’un dynamitage, il faut absolument éviter que quelque chose ne fonctionne pas correctement. C’est pourquoi, lors de la planification et de la préparation, nous prévoyons un grand nombre de mesures de sécurité.»
Selon Urs Haller, chef de projet du groupement DIB, la variante choisie de coupes pyrotechniques est la plus efficace et la plus sûre. «Ce procédé a l’avantage que seul un nombre limité de travaux en hauteur sont nécessaires. Après l’effondrement de la construction en acier, on ne trouve par terre, que peu d’éléments sous tension. C’est un important gain de sécurité pour le démontage et le cisaillage ultérieurs.»
Il y a plus de huit ans, la construction de la halle avait été planifiée et construite sur mesure pour l’assainissement de la décharge de Bonfol. Aucune autre utilisation n’a pu être trouvée pour cette construction. Un démontage au moyen de grues aurait duré bien plus de temps et il aurait été plus compliqué de garantir la sécurité du travail. Cela aurait également coûté plus cher.
 
Les grands arcs en acier de la halle d’excavation effondrés.
 



La déconstruction à l’aide de coupes pyrotechniques
La structure de la halle
La structure principale de la halle était composée de neuf arcs, dont les extrémités étaient reliées par des tirants métalliques horizontaux qui maintenaient les arcs dans leur forme. Ces tirants étaient suspendus aux arcs et la toiture était posée sur les tirants. La construction était appuyée d’un côté sur le grand mur en béton et de l’autre côté sur une paroi pendulaire basée sur une fondation linéaire. Les dimensions de la halle étaient les suivantes: largeur 150 m, longueur 122,5 m, hauteur 43 m. Son poids est de 2500 t.
 
L’affaiblissement préalable de la construction
Dans tous les arcs, mais uniquement dans leur partie inférieure, des écrous ont été enlevés de leur vis à quatre endroits. À côté du mur en béton comme à côté de la paroi pendulaire, les fixations des rails des ponts roulants et des poutres de la toiture ont été enlevées. Pour avoir un fonctionnement articulé au niveau de la paroi pendulaire, des fixations en haut et en bas ont été affaiblies.
 
Le minage
Pour la variante de minage choisie, un minimum de 20 kg d’explosifs est nécessaire pour faire tomber la halle.
L’accès aux points de minage a pu se faire par la toiture. Les neuf tirants des arcs ont été séparés à côté de la paroi pendulaire, par des coupes pyrotechniques. L’âme du profilé en double-T a été préalablement enlevé à l’aide d’un chalumeau et seules les deux ailes du profilé de 48 mm d’épaisseur ont été coupées avec deux charges d’explosifs. Pour chaque arc, les trois câbles en acier les plus proches de la paroi pendulaire ont également été coupés avec des coupes pyrotechniques. Une cinquantaine de charges d’explosifs totalisant 19 kg ont été posées.
 
Le principe de l’effondrement
En coupant les tirants à la hauteur de la paroi pendulaire, les arcs peuvent se détendre en direction de la paroi pendulaire. La partie supérieure de cette paroi est ainsi poussée vers l’extérieur et pliée vers le sol. À ce niveau, la construction tombe sur des plaques en acier qui ont été posées sur le sol pour ralentir la première impulsion et soutenir l’étirement des arcs. Le but était de faire tomber la structure métallique le plus bas possible sur le sol, afin d’obtenir un accès simple et sûr pour la déconstruction.
 
Le principe de la déconstruction à l’aide de coupes pyrotechniques.
 
 

Le démantèlement de l’infrastructure se poursuit
Dans les semaines suivant la démolition, on a commencé à cisailler les parties en acier au moyen de ciseaux hydrauliques et de chalumeaux, afin de pouvoir les transporter. L’acier recueilli dans des bennes est destiné au recyclage. Parallèlement, les démolitions des constructions en béton et des fondations des halles se poursuivent. Le béton lui aussi est recyclé. Les principaux travaux de démantèlement sur le site devraient être achevés à la fin de l’année.
 
La décharge industrielle de Bonfol
La décharge industrielle de Bonfol était un héritage de notre passé. Entre 1961 et 1976, l’industrie chimique bâloise, le canton de Berne, les industries régionales ainsi que l’Armée suisse ont déposé quelque 114 000 t de déchets spéciaux dans cette ancienne glaisière. En 1976, la décharge, qui couvrait une surface de deux hectares, a été fermée et recouverte d’argile.
Le dépôt de déchets chimiques dans la glaisière de Bonfol était à l’époque considéré comme exemplaire et moderne. L’amélioration de la technique et la prise de conscience accrue vis-à-vis de l’environnement ont fini par en faire un lourd fardeau. Entre 1986 et 1995, des mesures de sécurité étendues ont été prises pour limiter au maximum les effets sur l’environnement: système de drainage, station d’épuration, nouveau couvercle.
En 2000, le canton du Jura et les représentants de l’industrie chimique bâloise ont signé une convention relative à l’assainissement définitif de la décharge. En 2003, le projet d’assainissement a été élaboré conformément à l’Ordonnance sur les sites contaminés. En cinq ans, plus de 350’000 t de déchets hautement contaminés ont été extraits de la décharge pour être incinérés. En parallèle, 84’000 tonnes de matériaux de sol faiblement à moyennement contaminés ont été éliminés dans des filières appropriées, en Suisse et aux Pays-Bas.
Le coût total du projet d’assainissement définitif, y compris le post-assainissement, devrait s’élever à plus de 350 millions de francs. Le canton du Jura s’est battu durant de nombreuses années avant que l’industrie chimique bâloise accepte d’assumer le coût de l’assainissement.
 

À propos de BCI et bci Betriebs-AG
BCI est le sigle de Basler Chemische Industrie. C’est ainsi que s’appelle la société simple au sein de laquelle les principales entreprises chimiques bâloises assument leur responsabilité commune en matière de sécurité de la décharge industrielle de Bonfol. Afin de réaliser l’assainissement de la décharge de manière professionnelle, les entreprises membres de la BCI ont créé la société bci Betriebs-AG. Celle-ci est responsable de la planification et de la mise en œuvre de l’assainissement définitif de la décharge. Elle est également l’interlocuteur compétent pour toutes les questions ayant trait à la décharge industrielle de Bonfol.
 
 
Bernhard Scharvogel
bci Betriebs-AG
Tél. 061 685 15 06 / 079 598 39 43
bernhard.scharvogel@bcibag.ch
www.bci-info.ch