19 Dezember 2016 |
La Revue POLYTECHNIQUE
Espace & Particules (12/2016)
La prochaine étape du LHC
Le CERN a obtenu cette année l’approbation formelle de son conseil pour la prochaine étape du Grand collisionneur de hadrons (LHC). Il s’agit d’un programme visant à améliorer les performances de cet accélérateur dans les prochaines années. Cette approbation va permettre d’assurer son avenir en prolongeant son exploitation, au moins jusqu’aux années 2035-2040.
Notons encore que l’Inde va devenir Etat membre associé du CERN. L’accord signé le 21 novembre par Fabiola Gianotti, directrice générale de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire et Sekhar Basu, président de la Commission de l’énergie atomique de l’Inde, doit encore être ratifié par le gouvernement indien. L’Ukraine est également devenu membre associé le 5 octobre dernier, suite à la ratification du parlement ukrainien en octobre 2013.
Un nouvel accélérateur de particules
Le centre de recherche en physique nucléaire Ganil (acronyme de Grand accélérateur national d’ions lourds) du CEA et du CNRS, installé à Caen, dans le Calvados, a inauguré le 3 novembre dernier, un nouvel accélérateur de particules linéaire (et non circulaire, comme le LHC). D’une quarantaine de mètres, enfoui à 10 m sous terre, il porte le projet Spiral 2 (acronyme de système de production d’ions radioactifs accélérés en ligne). Ce projet a pour mission de produire des noyaux exotiques, à savoir des noyaux atomiques instables existant dans le cosmos, mais pas dans la nature (qui n’en comporte que 291). Deux mille huit cent de ceux-ci ont déjà été produits en laboratoire sur les 5000 à 7000 prédits par la théorie.
Cet accélérateur produit des ions radioactifs à partir de protons et de deutons (noyaux de deutérium), les accélère et les fait percuter de la matière afin d’observer des interactions dans des conditions extrêmes, de mieux comprendre l’origine des éléments super lourds (comportant plus de 104 protons) dans l’Univers et d’en étudier les propriétés. Ces particules sont accélérées à 20 % de la vitesse de la lumière, soit 61’000 km/sec. A la sortie de l’accélérateur, le faisceau est divisé en plusieurs parties, chacune faisant l’objet d’une expérience scientifique.
L’une d’entre elles a pour objectif de fabriquer de l’astate 211 (211At), le plus lourd des halogènes, de numéro atomique 85. Certains de ses isotopes sont utilisés en tant qu’émetteurs de particules α pour des applications scientifiques et médicales. On espère les injecter directement dans les tumeurs en les incorporant dans un anticorps pour traiter le cancer. L’211At est le plus rare des éléments naturels sur Terre. On estime qu’il y en a moins de 30 grammes dans la croûte terrestre. Dans une autre expérience, un faisceau d’ions viendra percuter une cible d’uranium pour créer, par fusion, des noyaux superlourds comportant plus de cent protons.
La demi-vie du tantale
La dernière évaluation de la période de désintégration du tantale (180mTa), le plus stable des éléments existant dans la nature, donne le chiffre de 45x1015 années, soit trois millions de fois l’âge de l’Univers ! Le noyau atomique du tantale compte 73 protons et 107 neutrons. C’est l’un des cinq nucléides stables composés d’un nombre impair à la fois de protons et de neutrons.
La particularité du 180mTa est d’être un isomère nucléaire du 180Ta, plus exactement le premier état excité de ce noyau (noté pour cette raison 180m1Ta). Le 180Ta à l’état fondamental est hautement instable. Il se désintègre en hafnium (180Hf) et en tungstène (180W) avec une période radioactive de 8,152 heures. Quant aux isomères 180m2Ta, 180m3Ta et 180m4Ta, ils, ont des périodes radioactives de quelques microsecondes.
Le 180mTa est en fait le seul isomère nucléaire connu dans la nature. Tous les autres isomères nucléaires sont synthétiques ou n’existent que transitoirement au cours de phénomènes énergétiques. On appelle isomérie nucléaire, le fait qu’un même noyau atomique puisse exister dans des états énergétiques distincts, caractérisés chacun par un spin et une énergie d’excitation particuliers.
Le nombre de galaxies sous-estimé
Les dernières données fournies par le télescope spatial Hubble indiquent que le nombre de galaxies observables dans l’Univers a été fortement sous-estimé. Il y en aurait 2000 milliards – chacune renfermant de 100 à 200 milliards d’étoiles et probablement autant de planètes -, alors que les astronomes estimaient qu’il y en avait dix fois moins.
La place de notre Système solaire
Une équipe internationale d’astronomes travaillant à l’Observatoire de la Montagne Pourpre à Nankin, en Chine, vient de préciser la position du Système solaire dans la Voie lactée. Contrairement à ce que l’on pensait jusqu’à présent, il ne se trouve pas sur un pont de gaz et d’étoiles entre deux bras de notre galaxie, mais sur l’un des bras principaux, à savoir le bras d’Orion, le cinquième de la Voie lactée.
Mise en service de l’accélérateur européen XFEL
Le 6 octobre a débuté la mise en service de l’accélérateur linéaire de 3,4 km de long du projet européen XFEL, auquel participe également la Suisse. Cette installation, située à Hambourg, produira des impulsions lumineuses très intenses et extrêmement brèves dans le champ de fréquence des rayons X. Elle offrira une capacité d’observation scientifique inédite, permettant de produire des images de virus à l’échelle atomique, de déterminer la composition moléculaire des cellules, d’observer le monde nanoscopique ou de saisir image par image des réactions physico-chimiques et biologiques. Ces observations devraient conduire à de nouvelles découvertes, qui pourront être mises à profit en physique appliquée, en science des matériaux, en médecine, en pharmacologie et dans bien d’autres domaines encore.
A l’Institut Paul Scherrer, une grande installation de recherche est également en phase mise en service. Il s’agit du laser à rayon X SwissFEL, un accélérateur linéaire de 740 m de long, qui émettra de très courtes impulsions de rayons X. La mise en service se fera par étapes et les premières expériences pilotes sont prévues pour 2017.
Cette installation permettra aux chercheurs de suivre des processus extrêmement rapides, tels que l’apparition de nouvelles molécules lors de réactions chimiques, de déterminer la structure détaillée de protéines ou de comprendre la composition exacte de matériaux. Ces découvertes déboucheront sur des applications pratiques, telles que le développement de nouveaux médicaments, de processus plus efficaces dans l’industrie chimique ou de nouveaux matériaux en électronique.