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01 August 2016 | La Revue POLYTECHNIQUE 05/2016 | Analytik

Validation de la conception d’un carter de réducteur (2e partie)

Pascal Pelloquin*

Dans l’article précédent (La Revue Polytechnique No 4 du 25 avril 2016), il était question de l’analyse statique de carters pour moteurs diesel chez Liebherr Machines Bulle SA. Nous allons aborder cette fois-ci l’analyse dynamique, l’analyse modale, l’analyse harmonique et l’analyse acoustique de ces éléments, ainsi que la définition des critères.
Les analyses statiques terminées, il est temps de passer aux analyses dynamiques. De nouvelles simplifications géométriques sont nécessaires avant de procéder à l’analyse modale et à l’analyse harmonique. Les vis sont remplacées par des contacts liés (linéaires), le cône de pré-tension étant pris en compte. Ceci permet de linéariser complétement le modèle, ce qui est nécessaire pour réaliser des analyses modales ou dynamiques sur base modale.

 
Définir les critères
Pour pouvoir évaluer les résultats de l’analyse modale, il faut définir des critères. Ceux-ci se basent sur les ordres non équilibrés du moteur diesel. Ces ordres non équilibrés sont imputables d’une part à l’inertie des pièces mobiles (vilebrequin, bielles, pistons) et d’autre part aux pressions de combustion. Ces ordres non équilibrés sont spécifiques à chaque type de moteur en raison notamment de l’ordre d’allumage, du nombre de pistons et, le cas échéant, de l’angle de disposition d’un moteur en V.
À l’aide de la formule ci-après, en fonction de l’ordre d’excitation, du régime du moteur et avec une certaine marge, il est donc possible de définir une plage de fréquences pour laquelle le moteur n’est pas équilibré pour des forces ou des moments dans une direction donnée (le moment dans l’axe du moteur, par exemple).
Il faut donc vérifier qu’aucune fréquence propre de l’agrégat ne se situe dans la plage à éviter. Si c’est le cas, il faut évaluer si le mode propre en question risque d’être excité par le moment non équilibré. Si ce n’est pas le cas, la conception est saine.
Si un mode propre est potentiellement excité à la fréquence d’un ordre non équilibré, il faut procéder à une analyse harmonique. Les accélérations à appliquer sont obtenues à partir de mesures faites sur des moteurs similaires, en prenant la valeur maximale (fig. 3). L’excitation/accélération est alors appliquée à la fréquence suspecte. Si les contraintes obtenues restent faibles, c’est que le mode propre n’est pas excité. Si les contraintes sont importantes, c’est que le mode propre est excité par l’ordre non équilibré du moteur diesel. Il faut alors procéder à une analyse à la fatigue. Comme la méthode est imprécise par nature (mesures non disponibles pour le nouveau modèle), il faut que les coefficients de sécurité à la fatigue soient suffisamment élevés pour garantir la tenue à la fatigue. Les analyses dynamiques terminées, on passe aux analyses acoustiques.
 
Fig. 3. Excitation harmonique.
 

Analyse acoustique
Mesures
La fig. 4 présente un exemple de mesure acoustique, avec la pression acoustique en fonction de la fréquence. De manière générale, on sait que les pics de pression dominants sont les plus importants pour déterminer la puissance acoustique. On va donc chercher à identifier les différents pics qui ressortent du lot (au-dessus d’un niveau déterminé arbitrairement).
On sait qu’une des excitations dominantes sur un carter de réducteur pour pompe provient de l’hydraulique. La formule ci-après donne les fréquences d’excitation en fonction du régime du moteur, du rapport de transmission, du nombre de pistons et de l’ordre d’excitation. On peut ainsi identifier six pics sur le diagramme, qui correspondent aux pompes. De ces six pics, plusieurs sont plus hauts que la ligne tracée; ils ressortent donc du lot. Il faut prendre en compte ces pics dans le calcul.
De manière similaire, on peut identifier deux autres pics sur le graphique, à l’aide de la formule ci-après correspondant à l’excitation due aux engrenages (fonction du régime du moteur, du nombre de dents sur la roue entraînante et des ordres).
On a ainsi pu définir les six principaux pics pour l’exemple décrit.
 
Fig. 4. Exemple de mesure acoustique.
 

Forces d’excitation
Après avoir identifié les fréquences d’excitation, il reste à définir les forces correspondantes pour pouvoir les prendre en compte dans le modèle de calcul. Pour la pompe hydraulique, le département de simulation hydraulique fournit une courbe qui correspond aux efforts axiaux dans la pompe, en fonction de l’angle de rotation. On obtient le contenu fréquentiel en effectuant une transformation de Fourrier sur cette courbe. L’ordre zéro correspond à la force constante. Les ordres suivants sont remarquables: 9, 18, 27, 36. En divisant par le nombre de pistons hydrauliques (9), on obtient les 1er, 2e, 3e et 4e ordres pour cette pompe. L’amplitude de ces ordres correspond à la force. Nous avons donc une force d’excitation pour les différents ordres de la pompe hydraulique.
Pour les engrenages, c’est le logiciel KissSoft (spécialisé notamment dans le calcul de systèmes à engrenages, de Kissling) qui permet d’obtenir les courbes de forces. Celles-ci donnent les efforts sur les paliers en fonction de l’angle d’engrènement. Ici aussi, le contenu fréquentiel est extrait à l’aide d’une transformation de Fourrier. L’ordre zéro correspond à la force constante. On utilise les trois ordres suivants, qui sont dominants, comme excitation pour les ordres de l’engrènement.
 
Généralités sur le modèle
Le calcul doit être relativement similaire aux mesures (où le diesel est remplacé par un moteur électrique). Le moteur diesel n’est donc pas compris dans le modèle acoustique; il est remplacé par un corps simplifié. Un volume d’air correspondant au positionnement des microphones est modélisé autour du carter de réducteur. Ce volume d’air est entouré d’une couche d’éléments finis absorbant les ondes acoustiques, ce qui permet de simuler un domaine infini. On peut ainsi déterminer la puissance acoustique du carter de réducteur.
 
Maillage pour le modèle acoustique
De manière à décrire correctement les ondes acoustiques, il faut utiliser six éléments par longueur d’onde, selon la formule ci-après. Pour une fréquence élevée, la taille des éléments peut être aussi faible que 10 mm, ce qui implique de très gros maillages qui, a leur tour, impliquent l’utilisation d’un cluster de calcul.


Le calcul
Le calcul se déroule en deux étapes.
  • Le premier calcul concerne la partie structurelle et l’huile. Par analogie avec un verre d’eau, la réponse du verre à une excitation ne sera pas la même s’il est plein ou vide. C’est pourquoi l’on tient compte de la présence de l’huile dans le carter de réducteur et dans les pompes. On obtient alors la réponse de la structure à l’excitation due aux pompes et aux engrenages.
  • Le second calcul concerne la transmission des vibrations à l’air ambiant. Ce sont les vitesses à la surface du carter qui sont appliquées à l’air.
 
Il faut alors faire un calcul par ordre d’excitation du moteur pour chaque régime du moteur considéré. Comme le temps de calcul est important, on se contente, par exemple, d’un calcul tous les 50 tr/min sur la plage de vitesse du moteur.
 
Les résultats
Les résultats de l’analyse sont les suivants (par ordre d’excitation et par régime moteur):
  • Vitesse à la surface de la structure (fig. 5).
  • Pression acoustique à la surface (fig. 6).
  • Pression acoustique dans l’air (fig. 7).
  • Puissance acoustique.
 
Fig. 5. Vitesse à la surface de la structure.
Exemple: basse fréquence.
Fig. 6. Pression acoustique à la surface.
Fig. 7. Pression acoustique dans l’air.
 
Pour obtenir la puissance acoustique totale, il faut encore faire la somme sur tous les ordres à l’aide de la formule ci-après. On obtient ainsi la puissance acoustique pour les différents régimes du moteur (fig. 8). C’est la courbe qu’on cherche à optimiser.
Une première comparaison avec des mesures effectuées indique une erreur de moins de 2 dB, ce qu’on considère comme un très bon résultat.
 
Fig. 8. Puissance acoustique.
 

Conclusion
Si tous les résultats sont satisfaisants, le carter de réducteur est validé au niveau du calcul, sinon des modifications s’imposent. Liebherr Machines Bulle SA accorde une grande importance à ces calculs, car les essais ne permettent pas de valider certains aspects du réducteur, comme la réponse aux charges externes avant installation dans le produit final, par exemple.
CADFEM - ANSYS
1020 Renens
Tél.: 021 614 80 40
www.cadfem.ch
 
Liebherr Machines Bulle SA
1630 Bulle
Tél.: 026 913 31 11
www.liebherr.com

 

* BT1-Simulation, Liebherr Machines Bulle SA