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30 janvier 2020 | Sécurité Environnement 04/2019 | Environnement

La Suisse à la pointe de la bataille pour le photovoltaïque européen

L’Union européenne veut reprendre la main sur le marché du panneau solaire et elle compte sur la Suisse. Bruxelles a accordé en septembre 10,6 millions d’euros (11,4 millions de francs) de financement au projet HIPERION qui prépare des panneaux de nouvelle génération, plus efficaces et capables d’engranger l’énergie solaire même par temps couvert. Battue en brèche par la compétitivité et le quasi-monopole chinois, l’Europe compte sur la technologie très prometteuse, voire révolutionnaire, d’une start-up basée à Ecublens, dans la région lausannoise.
Autrefois dominé par l’Allemagne, le marché mondial du panneau solaire est désormais largement assujetti à l’offre chinoise qui en contrôle insolemment le 80 %. Aujourd’hui, plus de neuf entreprises de panneaux photovoltaïques sur dix sont chinoises et leurs produits sont vendus 45 % moins chers que ceux de leurs concurrents du Vieux Continent. Pour lutter contre cette concurrence jugée parfois déloyale, les Européens ont introduits en 2013 des droits de douane. Mais ces taxes exaspèrent les entreprises spécialisées dans la pose des panneaux, qui demandent leur suppression. La Commission européenne a promis de lever progressivement ces mesures anti-dumping. Faute de victoire sur le terrain commercial, c’est donc sur celui de la performance que vont se livrer les prochaines batailles, grâce aux recherches conduites en Suisse.
 
Les panneaux conçus par Insolight font appel aux techniques utilisées dans l’espace et offrent des performances inégalées. (© CSEM)
 

Des panneaux ultra-performants
Le projet HIPERION, acronyme de « Hybrid Photovoltaics for Efficiency Record using Integrated Optical technology » (Système photovoltaïque hybride pour l’efficacité utilisant la technologie de l’optique intégrée) est géré par un consortium de seize membres suisses et européens coordonné par le Centre suisse d’électronique et de microtechnique (CSEM) dont le siège principal est à Neuchâtel. Objectif : battre en brèche la production asiatique en lançant la production et la mise sur le marché de modules solaires très performants basés sur la technologie révolutionnaire de la start-up vaudoise Insolight installée sur le site de l’Innovation Park de l’EPFL.
Dans la phase de pré-production, les prototypes de panneaux de nouvelle génération testés sur plusieurs sites pilote par Insolight dans des conditions d’essai standard, notamment en plein air, atteignent une efficacité de 29 à 30 %. C’est très largement au-dessus des niveaux d’efficacité des panneaux photovoltaïques standards qui n’atteignent généralement que 18 à 20 %. Ces nouveaux panneaux peuvent aussi bien être installés sur des toits ordinaires, des installations au sol ou sur des panneaux solaires déjà existants. Pour parvenir à ce résultat, la start-up d’Ecublens s’est inspirée d’une recette déjà éprouvée dans le domaine spatial en utilisant un processus de suivi optique planaire qui concentre la lumière du soleil sur des cellules multi-jonction disposées sur une surface de silicium conventionnelle.
 
Le projet HIPERION se fonde sur la technologie solaire mise au point par la start-up suisse Insolight. (© ENGIE Laborlec)
 
 

Enthousiasme et confiance
Le président de la jeune pousse vaudoise, Laurent Coulot, se montre très confiant : « Nous avons développé des capteurs solaires plats qui recueillent un maximum d’énergie en suivant la lumière du soleil au fil de la journée et en la concentrant sur des cellules à haute efficacité. Cette technique permet d’atteindre des rendements record tout en restant opérationnelle par temps couvert », déclare-t-il. En ce qui concerne les objectifs du projet HIPERION, il ajoute : « Il s’agit maintenant d’optimiser les composants pour faciliter la production de masse des panneaux et assurer leur performance pendant 25 ans. En parallèle, nous allons mettre au point les étapes clés de l’assemblage en construisant les équipements nécessaires ».
 
L’équipe de Christophe Ballif accueillera la première ligne de production pilote des nouveaux panneaux révolutionnaires. (© CSEM)
 

 

L’enthousiasme n’est pas moindre du côté du  CSEM. Christophe Baillif en est le directeur du PV-Center en charge du photovoltaïque. Selon lui, « nous avons là une magnifique opportunité de redynamiser la filière européenne du photovoltaïque à haute performance. L’enjeu de ce projet n’est pas uniquement économique. Importer une solution écologique d’Asie n’est pas idéal. Nous devons proposer davantage de solutions compétitives produites localement, à des citoyens et des citoyennes toujours plus conscients du défi environnemental auquel nous sommes confrontés. » C’est son équipe qui accueillera la première ligne de production pilote de ces nouveaux panneaux révolutionnaires. Le projet HIPERION a démarré en septembre et doit durer 48 mois.
 
À propos du consortium HIPERION
La Suisse est particulièrement bien représentée au sein du consortium HIPERION coordonné par le CSEM. Outre la start-up Insolight on y trouve l’entreprise bernoise Sonceboz SA qui va travailler sur les moteurs des capteurs, le producteur de systèmes photovoltaïques 3S Solar Plus SA à Thoune ainsi que l’incubateur d’idées Compaz. Les autres partenaires du projet sont, pour la recherche, l’Universidad Politécnica de Madrid (Espagne), l’Institut Fraunhofer des systèmes à énergie solaire (Allemagne), l’Université de Technologie de Lodz (Pologne). Les partenaires de l’industrie sont Mondragon Assembly(Espagne), X-Celeprint (Irlande), Argotech a.s. (République tchèque), IQE plc (Royaume-Uni) et ENGIE Laborelec (Belgique). Deux installateurs solaires sont également associés au projet : Muon Electric (Portugal) et Milieu Studio (France). Enfin, en association avec Compaz, L-UP SAS (France) sera en charge de la communication et de certains aspects de la coordination.
 
 
Christophe Ballif

Chef du solaire au CSEM et à l’EPFL
Christophe.ballif@epfl.ch
Tél. 021 695 43 36
 
Insolight
www.startup.ch/insolight