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24 janvier 2019 | Sécurité Environnement 04/2018 | Environnement

Un planeur sous-marin sonde les tourbillons du Léman

D’immenses tourbillons, appelés gyres, se forment dans les océans et dans les grands lacs. Deux laboratoires de l’EPFL, en collaboration avec l’université Davis de Californie, sondent l’un des gyres du lac Léman à l’aide d’un robot planeur sous-marin, pour comprendre comment il influence l’écosystème.
C’est une première dans le lac Léman. Un robot planeur sous-marin a traversé l’Atlantique pour aider les chercheurs à collecter des données inédites qui permettront de mieux comprendre l’impact des gyres sur la structure tridimensionnelle de l’écosystème aquatique. Capable de descendre à 1000 m de profondeur dans les océans, ce robot va glisser, grâce à ses deux ailes, dans un des gyres du lac Léman pendant plusieurs semaines.
 
Pour mieux comprendre la structure de l’écosystème aquatique, les chercheurs vont étudier l’un des gyres du lac Léman.
 
 

Deux gyres d’une dizaine de kilomètres de diamètre dans le Léman
Les gyres océaniques, induits par les courants et la rotation de la Terre, mesurent des milliers de kilomètres de diamètre. Ils peuvent provoquer l’accumulation des déchets plastiques, formant d’immenses vortex de détritus. Dans le lac Léman, deux gyres d’une dizaine de kilomètres de diamètre chacun, peuvent se former, sous l’effet de la bise et des courants, entre juin et octobre. Ils apparaissent dans les parties les plus larges du lac, au sud-ouest de Morges et au sud-est de Lausanne. Les chercheurs ont décidé d’étudier le premier, où naviguent moins de bateaux qui pourraient potentiellement entrer en collision avec le planeur chaque fois qu’il refait surface.
 
Grâce à ses deux ailes, le robot va glisser dans l’un des gyres du lac Léman pendant plusieurs semaines.
 
 

Le phénomène des gyres n’a pas dévoilé tous ses secrets
Le phénomène des gyres est connu, mais il n’a de loin pas dévoilé tous ses secrets. Alexander LeBaron Forrest est un expert en la matière. Professeur à l’université Davis en Californie, il a mené plusieurs projets de recherche sur les gyres dans le monde entier, en utilisant des robots autonomes. Il a également collecté des données dans le lac Tahoe en Californie, qui présente de grandes similitudes avec le Léman. «Notre objectif est de mesurer la turbulence dans les gyres aussi précisément que possible, afin que nous puissions en apprendre davantage sur la façon dont l’hydrodynamique affecte l’environnement du lac», déclare-t-il.
Que transporte ce tourbillon sur les rives et dans le milieu du lac? Quel est son impact sur les nutriments qu’il pousse vers la surface ou aspire dans les profondeurs? Quel est son rôle dans la réoxygénation de la surface de l’eau? Quelle est la teneur en chlorophylle? Oscar Sepúlveda, du Laboratoire de physique des systèmes aquatiques (APHYS), observe plus précisément l’impact du gyre sur la couche de phytoplancton qui se forme chaque été dans les eaux du lac. «Je voudrais comprendre si ce processus de mélange dû au gyre affecte la structure et la distribution du phytoplancton dans le lac», explique-t-il.
 
Les gyres du lac Léman.
 
 

Une batterie de capteurs intégrés au robot
Pour tenter de répondre à toutes ces questions, il a fallu non seulement l’expertise d’Alcherio Martinoli, qui dirige le Programme doctoral en robotique, contrôle et systèmes intelligents (DISAL), mais aussi une batterie de capteurs intégrés au robot. Celle-ci inclut un capteur de température haute fréquence miniaturisé, installé dans les laboratoires de l’EPFL par Hydromea, l’une des Jeunes pousses de l’école.
«Jusqu’ici, les données étaient récoltées grâce à des capteurs attachés à un filin et descendus à la verticale du bateau. Avec cette technique, nous avons beaucoup appris sur les turbulences, sur les échanges avec les sédiments, mais c’était de manière très localisée. Grâce à ce planeur de l’université Davis, nous allons pouvoir sonder de très grandes zones du tourbillon», explique Johny Wuest, qui dirige le Laboratoire APHYS à l’EPFL et mène également des recherches en physique aquatique à l’Institut fédéral suisse des sciences et technologies de l’eau (Eawag).
 
C’est l’un des gyres du Léman qui détourne ainsi les eaux du Rhône.
 
 

Le robot n’interfère pas sur la prise de mesures
Le planeur peut, en effet, se déplacer dans le gyre pendant plusieurs jours, refaisant surface toutes les quatre heures pour transmettre une partie de ses données via une connexion satellite. Sans éléments de propulsion, le robot n’interfère pas sur la prise de mesures. Autonome, il glisse dans les eaux du lac jusqu’à une profondeur de 250 m. En changeant son centre de gravité et la position de ses batteries à l’aide d’un système de ballast, il se déplace comme un yoyo et peut ainsi récolter des informations latéralement et verticalement, tout au long de son périple, qui s’étend sur plusieurs kilomètres.
 
Alfred Johny Wüest
Directeur du Laboratoire de physique des systèmes aquatiques
Tél. 021 693 80 04 / 021 693 63 68
alfred.wueest@epfl.ch
 
Oscar Rodrigo Sepúlveda Steiner
Assistant doctorant au Laboratoire de physique des systems aquatiques
Tél. 021 69 33938
oscar.sepulvedasteiner@epfl.ch
 
Prof. Alexander Lebaron Forrest
Université de Davis, Californie
Professeur invité au Laboratoire de physique des systems aquatiques
Tél. 021 693 80 04
alexander.forrest@epfl.ch