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22 june 2016 | La Revue POLYTECHNIQUE 04/2016 | Économie

Affaires en baisse mais perspectives intactes

Dans l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM), la nouvelle surévaluation du franc suisse s’est traduite, en 2015, par une baisse notable des entrées de commandes (-14 %) et du chiffre d’affaires (-7 %). Le recul des marges fut encore plus dramatique; il a précipité de nombreuses entreprises dans les chiffres rouges.
Après l’abandon du cours plancher de l’euro, les entreprises ont été forcées à réagir rapidement. Ceci a accéléré un changement de structure, qui va laisser des traces cette année encore. Néanmoins, si les cours des devises et l’évolution conjoncturelle ne se détériorent pas davantage, nous pouvons nous attendre à une reprise de l’industrie MEM à moyen terme. C’est avant tout la numérisation qui apporte de nouvelles chances de croissance à l’industrie. La politique dispose aussi des ressources pour contribuer à un développement positif. Il faut maintenant préserver les accords bilatéraux, conclure de nouveaux accords de libre échange, ne pas intervenir dans le marché du travail libéralisé et finalement renoncer à toutes nouvelles charges financières et nouvelles réglementations.
 
La numérisation de toute la chaîne de création de valeur promet des augmentations de production.
Source: www.lycee-maritime-saint-malo.fr

 

Drastique diminution du chiffre d’affaires
Suite à l’abandon du cours plancher de l’euro et par rapport à la même période 2014, les entrées de commandes dans l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM) ont baissé de 13,4 % au quatrième trimestre 2015. Par conséquent, l’indice des entrées de commandes a reculé à un niveau qui est le deuxième plus bas des dix dernières années. Sur l’ensemble de l’année 2015, le chiffre d’affaires s’est ratatiné de 14 % par rapport à l’année précédente. Au quatrième trimestre 2015 et comparé à la période correspondante de l’année précédente, il a diminué de 7,3 %. Sur l’ensemble de l’année, la diminution a été de 7,0 %. Cette évolution négative touche aussi bien les entreprises de grande taille, que les PME.
 
Exportations en recul, sans exception
En 2015, dans l’industrie MEM, pratiquement toutes les catégories de produits ont affiché un recul massif des exportations. C’est la construction de machines (-7,2 %) qui a été la plus fortement touchée, suivie du secteur de l’électrotechnique/électronique (-6,2 %) et de la métallurgie (-5,5 %). Seul le recul des exportations d’instruments de précision aura été quelque peu modéré (-1,6 %). Globalement, les exportations de marchandises de l’industrie MEM ont diminué de 4,6 % en 2015 pour atteindre une valeur totale de 63,1 milliards de francs. Les principaux marchés ont évolué de façon contrastée. Les exportations vers l’UE, le débouché de loin le plus important, ont diminué de 5,8 %, celles vers l’Asie de 0,4 %. À l’inverse, les exportations à destination des États-Unis ont sensiblement augmenté en 2015 (+4,9 %). Selon les chiffres les plus récents de l’AFD, en janvier 2016, le recul des exportations de l’industrie MEM s’est poursuivi.
 
Une année noire en Suisse, une année faste en Allemagne
Toutefois, l’effondrement le plus dramatique a été enregistré au niveau des marges. Les membres de Swissmem estiment qu’au niveau de l’EBIT (bénéfice avant impôts) et sur la moyenne des entreprises, le recul était de 6 %. Un tiers environ des entreprises sont par conséquent retombées dans la zone des pertes opérationnelles.
Finalement, l’année 2015 entrera dans l’histoire de l’industrie MEM suisse comme une année noire. La réévaluation brutale du franc suisse a constitué un handicap compétitif considérable sur le marché européen. Pour se faire une image de l’ampleur de ce désavantage, il suffit de jeter un rapide coup d’œil sur l’industrie MEM allemande. Inspirées par la faiblesse de l’euro, les exportations ont pris l’ascenseur l’année dernière (1er trimestre: +8,2 %, 2e trimestre: +10,7 %, 3e trimestre: + 6,9 %). Ce boom s’est fait en particulier aux dépens des entreprises MEM suisses, qui perdent du coup de précieuses parts de marché.
 
Entrée des commandes de l’industrie MEM suisse. Base: premier trimestre 2001 = 100.

 

Des mesures qui pourraient porter leurs fruits
Après le 15 janvier 2015, les entreprises MEM ont réagi rapidement et engagé de nombreuses mesures pour absorber les conséquences négatives de la force du franc. Les entreprises ayant épuisé le potentiel des mesures d’efficience et de réduction des coûts, applicables à court terme après le premier choc du franc en 2011, ont été obligées de prendre des mesures encore plus drastiques.
Globalement, nous avons constaté un changement de structure accéléré qui coûte des emplois. L’année précédente, les quelque 1050 entreprises membres de Swissmem ont perdu, à elles-seules 1,7 % de leurs collaborateurs, ce qui correspond à quelque 2500 emplois. Ce changement de structure accéléré va se poursuivre cette année. Ce n’est que dans un an qu’il sera possible d’estimer combien d’emplois auront été sacrifiés sur l’autel de ces changements.
L’évolution de la situation dans la branche MEM dépend fortement du cours des devises et du développement conjoncturel dans les marchés les plus importants. Pour autant que ces paramètres ne se détériorent pas davantage, Swissmem pense que le creux de la vague pourrait être atteint cette année et qu’à moyen terme, une reprise serait même possible. 
 
Les chances de l’industrie MEM suisses restent intactes
 Outre l’innovation et l’amélioration de l’efficience, la numérisation de l’industrie offre de bonnes chances à la branche MEM en Suisse. Fondamentalement, l’industrie suisse est très bien positionnée pour jouer un rôle déterminant dans la conception de ces développements techniques et sociaux importants. La numérisation de toute la chaîne de création de valeur promet des augmentations de production considérables, crée la base pour des produits et prestations de services novateurs et permet de mettre en place de nouveaux modèles commerciaux. Ceci est valable tant pour les grandes entreprises, que pour les PME. C’est sur cet enseignement que les entreprises, la formation par l’État et la recherche dans les hautes écoles et hautes écoles spécialisées, ainsi que l’encouragement de l’innovation de la Confédération, doivent miser.
 
La politique doit aussi apporter une contribution importante
Afin que l’industrie puisse transformer ces conditions favorables en un succès économique, elle a besoin de bonnes conditions cadres en termes de politique économique. Pour Swissmem, les quatre points suivants sont essentiels:
  • Maintien des accords bilatéraux avec l’UE: les accords bilatéraux doivent absolument être préservés pour assurer un libre accès aux principaux débouchés.
  • Conclusion de nouveaux accords de libre-échange: des nouveaux accords de libre-échange, avec les États-Unis ou l’Inde, par exemple, assurent un accès privilégié aux marchés affichant actuellement les plus grands potentiels de croissance.
  • Pas d’interventions supplémentaires dans le marché du travail libéralisé: cela signifie qu’il faut maintenir la souplesse du marché du travail en Suisse, notamment au niveau du temps de travail. Les anciennes réglementations ne sont pas conformes aux modèles de travail modernes.
  • Halte à la sur-réglementation: les dispositions fédérales à gérer par les entreprises elles-mêmes ont atteint des proportions monstrueuses. Des facteurs de coûts et des obstacles administratifs toujours plus fréquents entraînent de nouveaux désavantages compétitifs et doivent par conséquent être évités.
 
La politique a les ressources pour encourager durablement les intentions d’investissement des entreprises MEM en Suisse, en améliorant activement les conditions cadres au niveau de la politique économique. En d’autres termes, il est grand temps que le Conseil fédéral, le Parlement et l’administration donnent aux entreprises un signal fort pour que les quatre points susmentionnés soient à l’ordre du jour de la politique.
 
Swissmem
8005 Zurich
Tél.: 044 384 41 11
www.swissmem.ch