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23 november 2017 | La Revue POLYTECHNIQUE

De nouvelles prescriptions sur les gaz d’échappement

Le 1er septembre 2017, de nouvelles prescriptions sur les gaz d’échappement des voitures de tourisme sont entrées en vigueur en Europe et en Suisse. Elles comblent les lacunes qui existaient dans la législation et contribueront en particulier à ce que les moteurs diesel deviennent plus propres, principalement en ce qui concerne les émissions d’oxydes d’azote. L’Empa recommande de n’acheter que des voitures diesel homologuées selon les normes Euro 6d-TEMP ou Euro 6d.
À la fin 2016, 3,1 millions de voitures à essence et 1,3 millions de voitures diesel étaient immatriculées en Suisse. Malgré une part qui ne s’élève qu’à 30 % de la totalité du parc de voitures de tourisme suisse, les véhicules diesel sont toutefois responsables de 80 % des émissions d’oxydes d’azote (NOx). Et ce sont aussi ces émissions qui sont à l’origine du récent «scandale du diesel» et qui sont depuis lors au centre du débat sur leur réduction.
 
Une Audi A3 équipée du «sac à dos de mesure» pour les mesures RDE (Real Driving Emissions). Ces mesures des émissions dans le trafic réel sur route sont obligatoires pour l’homologation des nouveaux types de véhicules, à partir du 1er septembre 2017. (Photo: Empa)
 
 
Des méthodes de mesure dépassées

La méthode de mesure actuelle des gaz d’échappement utilisée pour l’homologation des voitures de tourisme date des années 1970. Elle a été adaptée dans les années 1990. Cette méthode est donc dépassée et ne tient pas compte, par exemple, des systèmes de régulation électroniques qui ont justement permis la tricherie sur les gaz d’échappement.
Entre 2009 et 2011, cette inadéquation a incité la Commission économique pour l’Europe des Nations unies à créer des groupes de travail en vue de l’élaboration d’une nouvelle méthode de mesure des gaz d’échappement, dénommée «world-wide light duty vehicle test procedure». Des experts de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), de l’Office fédéral des routes (OFROU), de la Haute école spécialisée bernoise, ainsi que de l’Empa (WLTP) ont également contribué à ce développement.
 
Trois changements essentiels
Ces nouvelles prescriptions pour les voitures de tourisme, qui sont entrées en vigueur le 1er septembre, entraînent pour l’essentiel trois changements. Premièrement, le remplacement de l’ancienne méthode de mesure; deuxièmement, les émissions des gaz d’échappement doivent être mesurées en conduite réelle sur route; troisièmement, les constructeurs doivent communiquer quelles sont les fonctions de la commande du moteur en relation avec l’épuration des gaz d’échappement.
La mesure sur route, qui comprend un trajet d’une durée de 90 minutes au minimum, avec un pourcentage défini de trajets en ville, hors agglomération et sur autoroute, et qui demande l’installation d’un appareillage de mesure mobile sur le véhicule, est la partie la plus exigeante de cette nouvelle législation.
Ces nouvelles prescriptions pour les voitures de tourisme et les véhicules utilitaires légers seront mises en vigueur de façon échelonnée. Les véhicules qui bénéficient déjà d’une réception par type pourront être immatriculées, en règle générale, encore durant un an après le date d’entrée en vigueur des nouvelles limites d’émissions. Concrètement cela signifie que les voitures de tourisme qui bénéficient d’une réception de type selon la norme sur les gaz d’échappement Euro 6b valable jusqu’ici, pourront encore être immatriculées jusqu’à la fin du mois d’août 2018. Les voitures diesel homologuées selon cette norme présentent en règle générale, sur route, des émissions de NOxbeaucoup plus élevées qu’en laboratoire. C’est pourquoi l’Empa recommande de ne plus acheter de tels véhicules.
 
Une mise en vigueur en trois étapes
Ces nouvelles prescriptions sur les gaz d’échappement seront mises en vigueur en trois étapes. La première, la norme Euro 6c, ne comporte pas encore de valeurs limites pour les mesures sur route. Du fait de la nouvelle réglementation sur la communication des fonctions d’épuration des gaz dans la commande du moteur, les émissions de NOxdevraient malgré tout diminuer nettement par rapport aux véhicules actuels. Les voitures de tourisme Euro 6c peuvent encore être immatriculées jusqu’à la fin du mois d’août 2019. Il s’agit donc d’une étape intermédiaire vers des diesels propres.
 
Les recommandations de l’Empa pour les voitures à essence
Les voitures à essence sont, elles aussi, touchées par ces nouvelles prescriptions. Pour les voitures à injection directe, à partir de la mise en vigueur de la norme Euro 6c, la valeur limite du nombre de particule sera la même que pour les moteurs diesel, raison pour laquelle, tout comme sur les véhicules diesel, la majorité des voitures à essence ne pourront plus guère se passer de filtres à particules. Seules les voitures à gaz naturel respectent ces nouvelles prescriptions sans de nouvelles mesures techniques.
Finalement, la norme sur les gaz d’échappement Euro 6d sera mise en vigueur en deux étapes: la première, dénommée Euro 6d-TEMP, sera applicable de septembre 2019 jusqu’à la fin 2020. Elle mentionne, pour la première fois, des valeurs limites aussi bien pour les NOxque pour le nombre de particules pour les mesures sur route – mais ces valeurs limites sur route peuvent encore être jusqu’à 2,1 fois plus élevées que les valeurs limites des mesures en laboratoire. Avec la deuxième étape, la norme sur les gaz d’échappement Euro 6d, le facteur applicable aux écarts entre valeurs limites sur route et en laboratoire est réduit à 1,5. Pour des raisons de protection de l’air, l’Empa recommande de n’acheter que des voitures diesel respectant les normes sur les gaz d’échappement Euro 6d-TEMP ou Euro 6d.
 
La nouvelle législation comble certaines lacunes
La nouvelle législation sur les gaz d’échappement comble, en outre, certaines lacunes. Jusqu’à aujourd’hui, dans les essais de laboratoire, les véhicules pouvaient être testés avec des charges nettement moins élevées que celles avec lesquelles ils circulaient sur nos routes. Avec ces nouvelles prescriptions, le véhicule doit être testé dans sa version la plus légère, ainsi que dans sa version la plus lourde.
Jusqu’ici aussi, les constructeurs automobiles ne devaient pas indiquer les détails du fonctionnement de la commande du moteur et ils pouvaient ainsi réduire l’épuration des gaz d’échappement en dehors du laboratoire. Ceci n’est désormais plus possible avec ces nouvelles prescriptions, qui exigent la communication du mode de fonctionnement de l’épuration des gaz d’échappement dans la commande du moteur. L’introduction de mesures sur route proches de la réalité, qui réduit notablement les écarts importants entre les valeurs de mesure obtenues en laboratoire et les émissions réelles, constitue toutefois l’innovation la plus importante.
 
Les voitures diesel en Suisse
Avant l’an 2000, la part des voitures diesel dans les nouvelles immatriculations était inférieure à 5 %. Au tournant du millénaire, cette valeur a explosé pour dépasser les 20 % et même les 30 % après 2010. Cette évolution est en relation avec l’introduction de la technologie d’injection diesel dite «common rail» et le perfectionnement des turbocompresseurs, qui ont rendu notablement plus nerveux les moteurs diesel, auparavant plutôt poussifs. D’autre part, cette augmentation du nombre des voitures diesel est également due au fort accroissement du nombre des véhicules SUV (abréviation de Sport Utility Vehicle) à partir de 2010. Les moteurs diesel à couple élevé conviennent, en effet, mieux à ces 4x4 que les moteurs à essence tournant à haut régime.
 
Les émissions de NOx
Pour les voitures diesel, après l’introduction généralisée des filtres à particule, ce sont avant tout les émissions de NOxqui retiennent l’attention. Ces émissions se produisent du fait des températures et des pressions élevées régnant dans la chambre de combustion. Sur les moteurs à essence, les catalyseurs éliminent presque totalement ces émissions, ce qui n’est pas le cas sur les moteurs diesel, du fait de l’excès d’air dans les gaz d’échappement. C’est pour cette raison que pendant longtemps, les mesures de réduction des émissions des moteurs diesel ont porté sur des interventions qui entraînaient souvent une augmentation de la consommation de carburant.
Depuis quelque temps, des catalyseurs à accumulation de NOxet des catalyseur SCR (selective catalytic reduction) sont utilisés sur les moteurs diesel. Les catalyseurs à accumulation conduisent toutefois, eux aussi, à une augmentation de la consommation de carburant, alors que les catalyseurs SCR nécessitent un réservoir supplémentaire pour l’«AdBlue», une solution aqueuse d’urée qui - dosée correctement – transforme les NOxtoxiques en azote moléculaire (N2) inoffensif. De nombreux constructeurs automobiles n’ont utilisé jusqu’ici ces technologies que dans une mesure réduite, leur permettant juste de satisfaire les exigences nécessaires à l’homologation de leurs véhicules, soit le respect des valeurs limites fixées pour les mesures en laboratoire.
 
Christian Bach
Chef du Laboratoire Technologies de propulsion automobile de l’Empa
Tél. 058 765 41 37
christian.bach@empa.ch