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07 january 2016 | La Revue POLYTECHNIQUE

Des gaz d’échappement diesel sans oxydes d’azote: est-ce possible?

Le scandale qui touche VW a placé les émissions d’oxydes d’azote des voitures diesel au centre de l’actualité. Du fait de leur conception, les moteurs diesel ont toujours émis davantage d’oxydes d’azote que les moteurs à essence. Par contre ils consomment moins de carburant. S’il était possible d’épurer leurs gaz d’échappement, on aurait alors un moteur à la fois propre et économique. Des chercheurs de l’Empa travaillent à l’optimisation des catalyseurs des moteurs diesel.
Par rapport aux moteurs à essence, les moteurs diesel utilisent plus efficacement leur carburant et émettent ainsi, par rapport aux moteurs à essence, moins de ce gaz à effet de serre qu’est le dioxyde de carbone (CO2). Ceci, notamment, parce qu’ils fonctionnent avec un excès d’air; on parle alors de fonctionnement en régime pauvre. Du fait de l’excès d’oxygène dans leurs gaz d’échappement il n’est toutefois pas possible d’utiliser sur les moteurs diesel le catalyseur à trois voies bien connu des voitures à essence, qui est capable de décomposer plus de 98 % des oxydes d’azote (NOx) sur ces véhicules.

 
Les instruments de mesure optique laser dont dispose le laboratoire des moteurs de l’Empa permettent d’optimiser les systèmes de réduction des émissions d’oxydes d’azote des moteurs diesel.
 

Un procédé bien connu
Pour épurer tout de même les gaz d’échappement diesel de leurs oxydes d’azote, on a recours à un procédé développé à l’origine pour l’épuration des effluents gazeux des centrales thermiques. Il y bientôt dix ans qu’on a vu sur les routes les premiers camions équipés de catalyseurs utilisant cette technique. Ce procédé utilise une solution aqueuse d’urée, commercialisée sous la dénomination de «AdBlue», pour transformer les oxydes d’azote en azote gazeux inoffensif et en vapeur d’eau, à travers différentes réactions chimiques dans un catalyseur SCR (de l’anglais «selective reduction catalyst») optimisé spécialement pour la réduction des NOx. L’AdBlue est transporté sur les véhicules dans un réservoir spécial qui doit être périodiquement rempli, normalement lors du service du véhicule.
Les catalyseurs SCR sont toutefois notablement plus complexes que les catalyseurs à trois voies usuels des voitures à essence. Par exemple, le dosage de la solution d’urée AdBlue doit être exactement adapté à la quantité d’oxydes d’azote rejetée par le moteur; avec un dosage trop faible, la concentration des NOxprescrite par la législation n’est pas atteinte alors qu’un dosage trop élevé provoque des émissions d’ammoniac indésirables.
A cela vient s’ajouter qu’aux températures inférieures à 200 °C, l’injection d’urée a tendance à former des dépôts qui obstruent à plus ou moins long terme le catalyseur SCR. C’est aussi pourquoi Ces catalyseurs doivent être adaptés et optimisés spécifiquement pour les différents types de moteurs et les variations de charge attendues – c’est-à-dire le mode de conduite -, ce qui est très compliqué et coûteux.
 
La norme Euro 6: des prescriptions identiques pour l’essence et le diesel
Les catalyseurs SCR ne sont utilisés que depuis peu sur les voitures de tourisme. Les prescriptions actuelles applicables en Europe et aux Etats-Unis exigent que les catalyseurs SCR réduisent de plus de 95 % la teneur en oxydes d’azote des gaz d’échappement du diesel. De plus, avec l’entrée en vigueur de la norme Euro 6 au mois de septembre 2014, les véhicules à essence et diesel doivent respecter les mêmes valeurs limites de NOx; auparavant on avait toujours toléré en Europe des émissions légèrement plus élevées sur les véhicules diesel.
Le laboratoire Technologies de motorisation de l’Empa, dirigé par Christian Bach, qui travaille depuis plusieurs années sur les catalyseurs, a équipé à cet effet un laboratoire des fluides hautes températures spécial. Deux doctorants de l’équipe de Christian Bach étudient actuellement différents procédés d’injection d’urée dans le but d’obtenir une pulvérisation optimale et une distribution homogène de la solution aqueuse d’urée dans le flux des gaz d’échappement. Ces chercheurs utilisent pour cela un équipement de mesure laser pour quantifier et visualiser les minuscules gouttelettes de solution d’urée dans le flux des gaz d’échappement et étudier leur vaporisation et leur transformation chimique.
 

Une analyse réalisées dans le laboratoire des moteurs de l’Empa, qui met en évidence une distribution plane de l’urée dans les gaz d’échappement diesel (en rouge: concentration élevée; en bleu: faible concentration). L’idéal serait d’obtenir une concentration aussi régulière que possible de l’AdBlue.
 

Une meilleure compréhension pour des moteurs diesel propres
Les résultats expérimentaux ainsi obtenus sont utilisés en collaboration avec des collègues de l’EPF de Zurich et de l’Ecole polytechnique de Milan, pour paramétrer des simulations sur ordinateur de l’injection d’urée physiquement correctes et valider des modèles de simulation permettant de prévoir le taux de conversion d’un catalyseur dans différentes conditions d’exploitation.
«Avec ces travaux, l’Empa apporte une contribution à la poursuite de la réduction des émissions polluantes des gaz d’échappement des véhicules diesel» explique Christian Bach. «Mieux nous comprendrons cette technique dans ses moindres détails, plus les véhicules diesel circulant sur les routes deviendront propres.» Ces projets soutenus par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) et le Centre de compétence énergie et mobilité (CCEM) du Domaine des EPF, sont réalisés en collaboration avec différents partenaires industriels.
 
Empa
8600 Dübendorf
Tél.: 058 765 11 11
www.empa.ch