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24 february 2017 | La Revue POLYTECHNIQUE

Éditorial (2/2017)

Courrier, courriel et entretiens
À l’époque du tout numérique, les rapports personnels se déshumanisent. Le courriel, les SMS et la messagerie des réseaux sociaux supplantent de plus en plus les entretiens téléphoniques et les réunions. Mais cette communication virtuelle est superficielle et la quantité supplante souvent la qualité: que celui qui n’a jamais pesté le lundi matin en ouvrant sa messagerie électronique comportant une centaine d’objets de courriel lève la main! L’avantage du courrier électronique est que, contrairement au téléphone, il laisse une trace écrite, assurant de la sorte la traçabilité temporelle de la communication.
Mais le courrier électronique ne fait appel qu’à un seul sens: celui de la vision. En revanche, lors d’un entretien en tête à tête, les cinq sens sont sollicités simultanément, raison pour laquelle l’impact d’une rencontre personnelle n’a pas d’équivalent. On pourrait avancer l’argument de la perte de temps. Pas forcément: lors d’un entretien, les sujets peuvent être directement débattus autour d’un café, en échangeant propos, idées et documentation. Lorsque la réunion est close, tout est clarifié. Que de malentendus évités!
Il en va de même pour ce qui est de la correspondance: l’époque de la lettre bien tournée, envoyée par courrier postal, est pratiquement révolue et cette dernière est désormais remplacée par un courriel souvent bâclé et sans aucun réel effort de mise en forme. Je me souviens d’un gros bouquin ayant pour titre «Toute la correspondance», faisant autrefois autorité en la matière, dont l’auteur n’était autre que le professeur et écrivain Paul Thierrin*. Il s’agit d’un ouvrage comportant d’innombrables modèles d’objets de correspondance, d’une facture particulièrement plaisante, rédigé dans un langage fluide et spirituel. Actuellement, ce pavé fait évidemment figure de dinosaure. Toujours est-il que ce n’est pas parce qu’une communication revêt la forme de courrier électronique, qu’il faille forcément négliger la mise en forme et la présentation du texte. Si la forme change, le fond reste le même et en ce qui concerne les textes, rien n’empêche d’en soigner la présentation. Des outils sont à disposition pour ce qui concerne la mise en forme, entre autres les polices de caractère et leur couleur, le retrait des paragraphes, etc. Un courriel rédigé avec soin aura alors autant d’impact qu’une lettre traditionnelle rédigée dans les formes de l’art.
 

* Paul Thierrin (1923-1993) est notamment l’auteur des ouvrages suivants: Toute la correspondance, Mégots, La femme et l’enfant, L’enfant magicien, Buffet froid, Les limonaires, Le maquis, L’homme quelconque, Un homme, Arlequins, Roses acides.

Il a été le fondateur de l’École prévôtoise à Moutier et de l’École Panorama à Bienne. Fondateur également des éditions Panorama qui ont publié notamment les œuvres de Michel Simon, Blaise Cendrars et Léon Savary. – Voir aussi Wikipedia.
par Edouard Huguelet