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14 august 2017 | La Revue POLYTECHNIQUE

Le contrat de performance énergétique: un outil au service de la rénovation énergétique des bâtiments

Jean-Marc Zgraggen*

Nous commençons aujourd’hui une série d’articles reflétant les conférences présentées lors du 8e Symposium sur l’Efficacité Energétique, les Energies Renouvelables et l’Environnement dans le Bâtiment qui s’et déroulé le 29 mars 2017 à Yverdon-les-Bains.
La Stratégie énergétique 2050 fixe des buts ambitieux en termes d’efficience énergétique. Une grande partie du potentiel peut être réalisée dans le secteur des bâtiments, mais force est de constater que de nombreux projets d’efficience énergétique ne voient pas le jour pour de multiples raisons, comme le manque de ressources, les priorités d’investissements ou encore les doutes liés à la réalisation des économies d’énergie par exemple.

Les entreprises de services énergétiques (plus connues sous l’acronyme ESCO pour Energy Service Company) proposent un modère innovant permettant de lever la plupart des barrières à l’exploitation du gisement d’économie d’énergie: le contrat de performance énergétique (CPE).
L’ESCO intègre dans un seul contrat, l’ensemble des prestations nécessaire à la mise en œuvre d’un projet d’efficience énergétique et elle peut égarement organiser son financement. Pendant la phase d’exploitation, l’ESCO garantit les résultats sur lesquels elle s’est engagée. Ce modèle permet de garantir au client que le potentiel d’économie d’énergie sera exploité le plus largement possible.
Afin de développer le marché des CPE en Suisse, l’association nationale swissesco a été créée en septembre 2015 par quelques pionniers du marché, avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) et de SuisseEnergie.
swissesco est une association sans but lucratif et politiquement neutre, qui poursuit les buts suivants:
  • Mettre en place les conditions cadre pour le développement du marché suisse des ESCO et des facilitateurs de projets.
  • Informer, communiquer et promouvoir le CPE.
  • Coordonner les activités avec d’autres associations et institutions.
  • Contribuer à la normalisation des méthodes et processus.
  • Constituer et gérer une base de connaissances sur le marché ESCO.
 
Des informations supplémentaires sont disponibles sous www.swissesco.ch. L’association est égarement active sur Linkedln et Twitter.
 
Figure 1. Principe du CPE financé par l’ESCO (maître d’ouvrage).
 
 

La particularité du modèle
La particularité du modèle CPE est d’englober les différentes phases d’un projet que l’on acquiert généralement de manière séparée: l’étude, le développement, la réalisation et l’exploitation. Cette configuration est nécessaire pour que l’ESCO soit en mesure d’offrir une garantie sur les économies d’énergie générées par le projet.
L’ESCO développe, en étroite collaboration avec le client, un projet d’efficience énergétique permettant de générer des économies d’énergie et, dans certains cas, une réduction des frais de maintenance sur un ou plusieurs bâtiments.
L’investissement initial du projet peut être réalisé par l’ESCO, par un tiers investisseur ou par le client. Le remboursement du projet se fera ensuite en captant les économies d’énergie générées par le projet. Le financement se fera donc sur la base d’une baisse des charges d’exploitation (OPEX).
Le projet est ensuite mis en œuvre et suivi par l’ESCO, qui garantit les économies d’énergie générées pendant toute la durée du contrat ou capte une part de ces économies pour se rembourser selon le modèle de contrat mis en œuvre. En résumé, les caractéristiques principales d’une ESCO sont les suivantes:
  • L’ESCO assume des risques sur les plans technique, organisationnel et financier.
  • La rémunération de l’ESCO est liée à la performance réelle du projet.
  • L’ESCO peut financer elle-même les projets ou en garantir le financement.
 
Tableau 1. Deux exemples de projets CPE.
 
 

Le financement
La figure 1 illustre l’exemple d’un CPE développé, financé et mis en œuvre par une ESCO. Dans ce cas, une part des économies d’énergie générées pendant la durée du contrat sera captée par l’ESCO pour amortir son investissement. Le client bénéficiera de la part restante, puis de l’intégralité des économies dès la fin du contrat.
Si le financement du projet est réalisé par un tiers investisseur, ce dernier captera la part des économies d’énergie générées, tandis que l’ESCO garantira des économies d’énergie minimales pendant toute la durée du contrat. Cette prestation délivrée par l’ESCO permet de sécuriser la trésorerie générée par le projet et de réduire ainsi le risque de performance. Si le client finance le projet, il captera alors l’intégralité des économies d’énergie qui seront garanties par l’ESCO pendant toute la durée du contrat.
Quel que soit le modèle utilisé, I’ESCO possède une incitation économique à générer rapidement et dans la durée un maximum d’économies d’énergie, puisque sa rémunération est liée à la performance réelle du projet. Les intérêts des deux parties sont donc parfaitement alignés.
 
L’évaluation des économies d’énergie
Une évaluation fiable et transparente des économies d’énergie est un facteur clé de succès d’un projet CPE. De nombreuses ESCO utilisent pour cela le Protocole international de mesure et de vérification de la performance énergétique (IPMVP) porté par l’Efficiency Valuation Organization (EVO), une référence mondiale en la matière.
Cette méthodologie permet d’intégrer et de corriger tous les changements opérationnels et structurels qui peuvent avoir une influence sur la consommation d’énergie. La consommation d’énergie mesurée au compteur est comparée à un compteur virtuel qui indique ce que le système aurait consommé si le projet d’efficacité énergétique n’avait pas été mis en œuvre. La différence entre ces deux compteurs exprime la véritable économie d’énergie réalisée.
Le protocole IPMVP peut être téléchargé gratuitement sur le site de l’organisation EVO: www.evo-world.org/.
 
Un exemple de réalisation
Plus d’une dizaine de projets CPE ont déjà été réalisés en Suisse. Plusieurs d’entre eux font l’objet d’une fiche descriptive disponible sur le site de swissesco. Le tableau 1 présente, à titre d’exempte, une description succincte de deux d’entre eux.

 
Figure 2: Les cinq étapes de la procédure d’appel d’offre d’un CPE.
 
 

Le Guide suisse des CPE
L’association a publié le 28 novembre 2016, le «Guide suisse des contrats de performance énergétique (CPE)». Ce guide est le premier document de référence complet jamais élaboré pour la Suisse, concernant le modèle CPE et ses différents domaines d’application.
Le guide a été élaboré par l’association swissesco et ses membres, en collaboration avec l’Office fédéral de l’énergie (OFEN). Il fournit une aide pratique pour la mise en œuvre du CPE en Suisse. Il s’adresse en particulier aux collectivités publiques (communes, villes, cantons et administration fédérale) ainsi qu’aux entreprises publiques. Ce guide peut également être utilisé par les acteurs privés, pour lesquels la procédure d’appel d’offre peut être élaborée de manière beaucoup plus souple.
Le CPE est constitué de plusieurs phases, de l’organisation interne chez le client à la phase d’exploitation, en passant par la mise en œuvre des mesures. Outre la description du fonctionnement du CPE, ce guide offre un aperçu détaillé de la procédure d’appels d’offres publics et des cinq étapes qui composent le projet (figure 2).
Le guide est complété par des modèles de documents, tels que les documents-types pour l’appel d’offres ou encore des contrats-types. Les explications et les modèles de documents proposés par le guide aident non seulement à structurer les projets, mais également à réduire la charge de planification du côté des clients.
Le guide peut être téléchargé librement en français ou en allemand sur le site www.swissesco.ch.
 

* Président de l’association swissesco