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18 december 2018 | La Revue POLYTECHNIQUE 12/2018 | Énergie & Environnement

Énergie & Environnement (12/2018)

Mieux calculer l’empreinte carbone de d’électricité en Suisse
Quelle est l’empreinte carbone d’un kilowattheure consommé en Suisse? La réponse à cette question reste à ce jour difficile à formuler en raison de l’important nombre de variables impliquées dans ce calcul. Actuellement, l’empreinte carbone de l’électricité fournie en Suisse se base sur une moyenne annuelle, alors qu’elle varie constamment au fil de la journée. En parvenant à évaluer ce paramètre à l’heure, plutôt qu’en moyenne annuelle, des chercheurs de l’EPFL ont ouvert une brèche dans un secteur encore très opaque.
Leur méthode consiste à utiliser une plate-forme financière européenne qui calcule la production électrique horaire selon sa provenance, durant une année (2015-2016). Cette brèche offre une grille d’analyse plus fine aux fournisseurs et aux consommateurs d’électricité. Cette recherche montre, en effet, qu’à certaines heures de la journée, l’empreinte carbone est jusqu’à cinq fois sous-évaluée par rapport à ce qu’elle est réellement.
Ce n’est pas tout: «Cette analyse nous permet, par exemple, de savoir que lorsque je charge mon téléphone portable l’après-midi, j’ai plus de chance de tomber sur une ressource renouvelable que le soir», explique Didier Vuarnoz, co-auteur de l’étude avec Thomas Jusselme, tous deux membres du groupe Building2050, installé à Fribourg au sein du smart living lab. Les chercheurs viennent de publier leurs données en libre accès sur la plate-forme Data in Brief, pour donner la possibilité aux industriels et ingénieurs de les exploiter librement.
La Suisse produit une partie de sa propre électricité et en échange avec la France, l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie, sous forme d’importations et d’exportations. Il est ainsi difficile d’y voir clair et de savoir quel pays produit quoi à l’instant t. Les chercheurs ont ainsi eu l’idée d’utiliser une nouvelle base de données européenne afin de mieux comprendre ces échanges. Nommée «ENTSO-E transparency platform», cette plate-forme financière comptabilise notamment les flux énergétiques entre chaque pays d’Europe, heure par heure.
Les chercheurs ont traité ces données en convertissant les kilowattheures en carbone, en se basant sur le cycle de vie de chaque flux. Chaque kilowattheure produit à un moment donné a ainsi hérité d’une quantité d’émission de carbone en fonction de son origine, fossile ou renouvelable. Les chercheurs ont ensuite développé des visualisations comme outils pour voir rapidement, heure par heure, quel type d’énergie est utilisée à quel moment en Suisse, durant une année.
L’idée n’est toutefois pas d’encourager tout le monde à se focaliser sur les heures où les énergies renouvelables sont les plus utilisées, ce qui aurait comme résultat de déplacer le problème, mais de mieux consommer en développant de nouvelles stratégies.