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25 july 2019 | La Revue POLYTECHNIQUE

Transformer les bâtiments en générateurs d’énergie

L’EPFL devient coordinateur du projet européen Be-Smart, qui doit accélérer l’intégration d’éléments photovoltaïques lors de la construction et de la rénovation de bâtiments, en diminuant ses coûts de 75 % d’ici 2030. Cette démarche s’inscrit dans les normes européennes, exigeant à partir de 2020, des nouveaux bâtiments au bilan énergétique quasi nul.
Considérer l’énergie photovoltaïque comme un matériau de construction à part entière permet de l’utiliser directement lors de la construction ou de la rénovation d’un bâtiment. Ces façades et toitures intégrées transforment les bâtiments en producteurs d’électricité et réduisent les émissions de CO2. Pour développer et valoriser cette technologie – dite BIPV, Building Integrated Photovoltaics –, les acteurs du projet européen Be-Smart devront proposer des éléments multifonctionnels, assurant les rôles de matériaux de construction, c’est-à-dire isolants, antibruit et esthétiques, ainsi que de générateurs d’énergie. Ils travailleront également à mettre en place une méthodologie de travail pour les architectes et les entreprises de construction, ainsi qu’à faire baisser les coûts.
 
Les éléments photovoltaïques qui recouvrent cette façade s’adaptent aux exigences esthétiques, avec ici une première démonstration de façade photovoltaïque blanche. (Réalisée par Solaxess sur la base d’une technologie CSEM).
 
 

Des perspectives pour l’industrie européenne
Pour répondre à ces défis, le projet Be-Smart réunit, autour de l’EPFL et du CSEM à Neuchâtel, quinze acteurs, à savoir des instituts de recherche, des entreprises innovantes, des architectes et des entreprises de construction. «L’utilisation du photovoltaïque en façade et dans le bâtiment croît rapidement, notamment grâce au rôle de pionnier technologique de ces deux partenaires suisses. Mais il faut démocratiser l’accès à cette technologie, pour qu’elle trouve sa place au-delà des grands projets phares», explique Laure-Emmanuelle Perret-Aebi, coordinatrice du projet au Laboratoire de photovoltaïque et couches minces électroniques (PV-Lab) de l’EPFL.
Une accélération du BIPV ouvrirait des perspectives à l’industrieeuropéenne, en créant une forte demande pour des façades, des tuiles et autres éléments de construction photovoltaïques. «La technologie est différente de celles utilisées pour les panneaux solaires, pensée pour la production de masse et dont la production s’est déplacée en Chine. Le potentiel industriel du BIPV est en Europe», souligne la chercheuse.
Le rôle énergétique est évidemment l’autre atout de la technologie, au vu des performances du domaine de l’énergie solaire. «L’énergie solaire émet de dix à vingt fois moins de CO2que les centrales thermiques traditionnelles. Dans les grands parcs solaires, c’est aussi l’électricité la moins chère à produire, y compris dans des pays peu ensoleillés, comme l’Allemagne», indique Christophe Ballif, professeur à la Faculté des Sciences et Techniques de l’Ingénieur de l’EPFL, à la tête du PV-Lab, ainsi que directeur du PV-center au CSEM.
 
Tuiles photovoltaïques couleur terra-cotta (Projet réalisé en collaboration avec ISSOL et le CSEM, avec le soutien de l’Office fédéral de l’énergie, Userhuus, le canton de Fribourg. Installateurs: Solstis SA).
 
 

Amorcer un changement de mentalité
Concrètement, il est déjà possible de construire ou de rénover un bâtiment en y intégrant directement des éléments photovoltaïques. En Suisse, plus de 10’000 toitures ont déjà été construites de cette façon, avec des modules de tailles diverses et, plus récemment, avec des couleurs. Cependant, cette démarche est encore peu adoptée et rencontre des réticences. Quant au coût, si l’intégration d’éléments photovoltaïques coûte plus cher lors de la construction, ce surcoût est amorti après une période de dix à trente ans. Cela, sans prendre en compte les subventions potentielles, les possibilités de revendre l’électricité produite, ainsi que les émissions de CO2évitées.
 
Cette photo, qui représente un panneau solaire, montre jusqu’où les possibilités esthétiques peuvent aller aujourd’hui. (Photo réalisée par le CSEM et développée sur la base de sa technologie KALEO).
 
 

Une norme à adopter pour les nouvelles constructions
La technologie photovoltaïque utilisée dans le cadre du projet est basée sur le silicium cristallin, que l’on trouve sur la plupart des panneaux solaires. Les aspects de fiabilité sont centraux et font partie des objectifs du projet, puisqu’un panneau photovoltaïque qui devient élément de construction, doit pouvoir garantir une durée de vie de 30 à 50 ans.
Aujourd’hui, le temps de retour énergétique du solaire – c’est-à-dire le temps que nécessite une installation photovoltaïque pour restituer l’énergie dépensée lors de sa production – est de l’ordre d’un à trois ans. Selon les acteurs du projet, l’adoption massive de cette technologie pour les façades et les toits pourrait permettre de produire une quantité d’électricité pratiquement équivalente à celle consommée actuellement en Suisse. «Il n’y a plus de raison de ne pas intégrer de modules photovoltaïques dans toutes nouvelles constructions, cela doit devenir la norme», conclut Christophe Ballif.
 
Site internet du projet: www.besmartproject.eu/
Coordinateur: EPFL, Laboratoire de photovoltaïque et couches minces électroniques
Participants:
  • AIT Austrian Institute of Technology GmbH (Autriche)
 
  • Association Compaz (Suisse)
 
  • Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (France)
 
  • CSEM (Suisse)
 
  • Issol SA (Belgique)
 
  • Institutt for energiteknikk (Norvège)
 
  • Immoroc SA (Suisse)
 
  • L - UP Sas (France)
 
  • Oslo kommune (Norvège)
 
  • Padanaplast S.r.l. (Italie)
 
  • Saint-Gobain Sekurit Deutschland Gmbh & Co. KG (Allemagne)
 
  • Solaxess SA (Suisse)
 
  • Sustainable innovations europe sl (Espagne)
 
  • White Arkitekter Aktiebolag (Suède)
 
 
 

Référence

Le projet Be-Smart, qui a débuté au mois d’octobre 2018, a une durée de 4 ans et un budget total de 8’155’173 euros. Il est financé par le programme européen pour la recherche et l’innovation Horizon 2020, convention de subvention No 818009.
 
Laure-Emmanuelle Perret-Aebi
Coordinatrice du projet Be-Smart
Tél. 076 451 58 77
laure-emmanuelle.perret@epfl.ch
 
Prof. Christophe Ballif
Tél. 021 695 43 36

christophe.ballif@epfl.ch