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07 february 2013 | La Revue POLYTECHNIQUE 11/2012 | Recherche et développement

Un nouveau système de réduction des vibrations résiduelles

Sébastien Gay, Bernard Schneider, François Birling

L’Institut d’Automatisation Industrielle (iAi) de la HEIG-VD, en collaboration avec l’entreprise Mikron, a développé un système de réduction des vibrations résiduelles grâce à la méthode des profils de mouvements optimisés. Les objectifs étaient une application industrielle de haute performance et l’intégration de composants du marché, sans coûts supplémentaires.
Les machines de production, travaillant à haute cadence, génèrent souvent de fortes vibrations qui peuvent altérer la précision exigée. Pour atteindre des vitesses de production élevées, tout en garantissant une grande précision, il est donc crucial d’éliminer les vibrations. Une première solution consiste à rigidifier la structure mécanique de la machine, en agissant sur la géométrie ou les matériaux, par exemple. Ces modifications engendrent souvent des coûts supplémentaires.

La HEIG-VD, en collaboration avec l’entreprise Mikron SA à Boudry et bénéficiant d’un soutien financier de la fondation «Stähli-Boss», a développé une solution permettant d’optimiser le comportement vibratoire de la machine, en tirant parti des possibilités offertes par le système de commande, donc sans coûts supplémentaires. En tenant compte de la non-rigidité de la structure de la machine, l’approche consiste à déterminer un profil de mouvement optimisé, afin de diminuer fortement les vibrations résiduelles en fin de mouvement, sans modification de la machine et en gardant le même cadence. Ce principe est connu depuis 1968. Mais, la contribution de la HEIG-VD a consisté à l’intégrer dans des composants de contrôle courants du marché, tout en garantissant une facilité de mise en œuvre sur la machine.
 
Figure 1. Un banc d’essai test d’une structure simple masse-ressort à une seule fréquence propre.
 
Le principe des profils optimisés
Ces profils de mouvement sont obtenus en résolvant un problème mathématique d’optimisation complexe. Ce dernier, pouvant comporter plus de 600 variables, intègre un modèle de la structure mécanique de la machine. Ces profils optimisés, basés sur des splines, permettent de diminuer les vibrations résiduelles d’un facteur 60, par rapport aux profils de mouvement à Jerk limité (sauts d'accélérations) utilisés en standard, comme le polynôme de degré 5.
 
Figure 2. Vibration mesurée ou erreur de positionnement yr(t) mesurée en fonction du temps, due aux oscillations résiduelles, lors d’un déplacement de 100 mm en 170 ms, pour un profil de cinquième degré (bleu) et pour la spline optimisée (rouge).
 
Applicable à de nombreux domaines
Du fait du potentiel de cette innovation pour l’industrie suisse des machines, ce travail de diplôme a donné une suite au développement du système. Dans un premier temps, la démarche théorique, permettant d’obtenir des profils optimisés, a pu être encore améliorée. En particulier, ces nouveaux développements rendent possible le changement dynamique de la trajectoire pendant le mouvement, tout en continuant à bénéficier de l’élimination des vibrations. Grâce à cette nouvelle avancée, il est maintenant possible d’exploiter cette méthode de calcul sur toutes les machines construites sur la base de robots cartésiens. Puis, dans un deuxième temps, ce générateur de trajectoires optimisées d’un genre nouveau a été mis en œuvre, dans une phase d’industrialisation, en C++, en exploitant la plate-forme logicielle ConceptRT de la société Objectis SA, qui est une société d’essaimage de la HEIG-VD, active dans le logiciel pour solutions automatisées haut de gamme.
Cette plate-forme logicielle a permis de simplifier considérablement le portage de ces profils de mouvement, grâce à la maîtrise de la complexité apportée par l’approche orientée objet. Au final, les profils élaborés en laboratoire durant le travail de diplôme peuvent maintenant être facilement utilisés dans un environnement industriel, permettant avec très peu d’effort d’augmenter considérablement les performances des machines de production.
 
Figure 3. Un préhenseur oscillant selon yr(t) autour de la position d’équilibre u1après un mouvement du chariot de l’axe linéaire. Il faut attendre que les oscillations soient suffisamment réduites pour saisir la pièce.
 
Une solution déjà utilisée dans l’industrie
La méthode
La méthode développée à l’iAi utilise un programme mathématique d’optimisation pour obtenir un profil de mouvement optimisé. Dans le but de diminuer l’amplitude des vibrations, le problème d’optimisation intègre un modèle de la structure mécanique. De ce fait, il faut au minimum déterminer le mode propre principal de la structure. Pour s’affranchir d’une erreur d’identification ou de modélisation, la méthode intègre une grande robustesse sur les paramètres du système. Au final, le profil de mouvement optimisé, correspondant à une spline, permet de diminuer l’amplitude des vibrations résiduelles. En exploitant le principe de superposition, il est possible de redéfinir la cible à la volée, tout en garantissant un niveau de vibrations contrôlé.
 
Figure 4. Illustration du principe de redéfinition de la cible à la volée.
 
Les résultats
Sur une structure simple, devant réaliser des déplacements de 100 mm en 170 ms, les vibrations résiduelles ont été diminuées d’un facteur 60 par rapport à un profil polynomial du cinquième degré (standard des profils de cames, limitant les variations brusques d’accélération). Sur une machine réelle développée par la société Mikron, les vibrations résiduelles ont été atténuées d’un facteur 8,6, pour une fréquence propre spécifique. Les autres modes propres de la structure n’ont pas été excités davantage avec le profil optimisé.
 
La vidéo du projet: http://youtu.be/J8KztJ858i8
 
 
À propos de l’Institut d’Automatisation Industrielle (iAi)
Parallèlement à sa mission de formation des ingénieurs HES aux niveaux bachelor et master, l’Institut d’Automatisation Industrielle met ses compétences technologiques et ses spécialistes à la disposition des milieux économiques, dans le domaine de l’automatisation industrielle et biomédicale.
Cette collaboration en recherche appliquée, en développement et en industrialisation prend généralement la forme d’expertise-conseil, de projets, voire de cours de post-formation sur mesure.
Pour des projets industriels novateurs et comportant de ce fait un risque technologique non négligeable, l’Institut d’Automatisation Industrielle contribue à la recherche du cofinancement public approprié (CTI, EU, etc.).
La mécatronique a pour principe l’association de compétences diversifiées (mécanique, électronique, informatique, etc.), qu’il faut évaluer et choisir pour satisfaire au mieux les objectifs au niveau «système». L’Institut d’Automatisation Industrielle dispose d’un réseau étendu permettant d’associer à chaque projet, les partenaires les mieux appropriés.