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28 september 2018 | La Revue POLYTECHNIQUE

Une avancée dans la lutte contre les arythmies cardiaques

Elsbeth Heinzelmann*

Plus on avance en âge, plus le risque d’arythmie cardiaque augmente, car le muscle cardiaque vieillit et devient moins performant. Un manque d’exercice, des kilos en trop, une consommation excessive d’alcool ou le stress qui fait grimper la tension artérielle, tout cela endommage le muscle cardiaque si bien que le cœur se désynchronise. Des chercheurs du centre BFH Technologies en sport et médecine étudient ce problème.
Dans «diagnostic» se cache le terme grec «gnósis» qui signifie «connaissance». C’est exactement ce qui préoccupe les chercheurs de la Haute école spécialisée bernoise BFH de Bienne. Ils mesurent les signaux ECG (électrocardiogramme) dans l’œsophage – particulièrement adaptés pour analyser le rythme cardiaque – afin d’innover dans le domaine du diagnostic.

 
Le centre BFH dispose d’une salle blanche de classe ISO 7, équipée pour la production d’appareils medtech selon la norme de qualité ISO 13485.
 
 

La fibrillation auriculaire: une maladie courante
La fibrillation auriculaire est le type d’arythmie cardiaque le plus fréquent. Les battements des oreillettes ne sont pas coordonnés. Selon une étude portant sur les trente dernières années, 0,5 % de la population en souffre et 15 % à l’âge de 75 ans.
L’électrocardiogramme permet d’enregistrer l’activité électrique du muscle cardiaque. À cet effet, le médecin fixe des électrodes sur la cage thoracique du patient. «Mais de nombreux troubles du rythme cardiaque sont causés par les oreillettes situées en profondeur dans la cage thoracique, et souvent un ECG standard ne les détecte pas de manière satisfaisante», déclare le professeur Marcel Jacomet, responsable de l’Institute for Human Centered Engineering HuCE à la Haute école spécialisée bernoise de Bienne.
 
Dans le cadre de mandats et de projets, la salle blanche du centre BFH peut aussi être mise à disposition de partenaires externes.
 
 

Des signaux ECG mesurés dans l’œsophage
Les signaux ECG peuvent aussi être mesurés dans l’œsophage, car celui-ci aboutit dans l’estomac en passant derrière le cœur, près des oreillettes. Ce fait est certes connu depuis longtemps et les signaux ont déjà été utilisés pour les analyses. Actuellement, les chercheurs de la BFH développent de nouveaux outils pour capter ces signaux de manière plus simple et mieux adaptée, afin qu’ils puissent leur appliquer de nouveaux algorithmes.
«Si nous mesurons l’ECG directement dans l’œsophage, les signaux des oreillettes enregistrés sont très précis et de haute qualité», déclare le professeur de d’électronique qui, épaulé par quelque 70 jeunes ingénieurs, doctorants et professeurs, veut réaliser ainsi un nouvel outil de diagnostic en technique médicale, ainsi que d’autres projets dans ce domaine à l’Institut HuCE.
 
Un cathéter œsophagien ECG produit selon la norme de qualité ISO 13485 dans la salle blanche du centre BFH Technologies en sport et médecine. À l’arrière-plan: un cœur.
 
 

Des cathéters œsophagiens spéciaux
Dans la pratique, l’équipe de chercheurs combine l’ECG traditionnel avec l’ECG œsophagien. Ils effectuent des mesures avec des cathéters œsophagiens spécialement conçus à cet effet, qui offrent une très haute résolution locale du signal.
«Un tel cathéter, qui a la forme d’un gros spaghetti, est introduit dans l’œsophage par le nez et est ensuite «avalé» par le patient», explique Marcel Jacomet. Le patient a certes besoin d’un temps d’adaptation, mais le risque encouru est minime et cela ne prend pas beaucoup de temps. Les chercheurs tentent ensuite de saisir et de représenter avec une grande précision, en 2D et en 3D, les résultats des signaux mesurés de l’activité cardiaque électrique, à l’aide d’algorithmes mathématiques, afin de détecter d’éventuels anomalies ou défauts dans le système électrique du cœur.
«Cette méthode offre au cardiologue un outil de diagnostic qui l’assiste efficacement dans la planification des interventions. Pratiqués en position assise ou couchée, une telle opération ne nécessite pas de narcose, éventuellement juste un peu de gel pour anesthésier localement les muqueuses nasales», précise le docteur Reto Wildhaber, médecin à l’Institut HuCE BFH. Les chercheurs espèrent ainsi réduire la durée des interventions et augmenter leur taux de réussite. Non seulement les patients s’en réjouissent mais l’économie réalisée est substantielle.
 
Comparaison entre un ECG standard (noir) et un ECG œsophagien (bleu)
 
 

De grandes compétences dans divers domaines
L’association de la recherche et de la production d’un nouveau cathéter ECG œsophagien, que nous décrivons brièvement ici, n‘est évidemment pas anodine. Elle exige de grandes compétences dans des domaines des plus divers. Au centre BFH Technologies en sport et médecine, l’équipe de Marcel Jacomet élabore, en collaboration avec des médecins de la Clinique universitaire de cardiologie de l’Hôpital de l’Ile de Berne, un savoir-faire médical en bénéficiant du soutien d’experts BFH du génie électronique, de la microtechnique et de la technique médicale, ainsi que d’étudiantes et étudiants en master.
Une salle blanche du centre BFH, certifiée pour développer des dispositifs médicaux, permet de produire en interne les nouveaux cathéters, selon des normes de qualité médicale. Des patients participent à une étude en cours à l’hôpital de l’Ile de Berne et fournissent ainsi de précieuses données pour la recherche. La certification Medtech du centre BFH, selon la norme ISO 13485, garantit la sécurité du cathéter de recherche utilisé.
 
Dessin d’un cœur avec position du cathéter œsophagien ECG. Le dessin est tiré de la thèse de doctorat de Simon Mortier, à la Faculté de médecine de l’Université de Berne. (© HuCE, BFH Bienne)
 
 

Un programme prioritaire pour outils de diagnostic œsophagien
Marcel Jacomet et son équipe explorent un nouveau terrain dans ce domaine. Le programme prioritaire «Medtech Devices pour outils de diagnostic œsophagien ECG» de la Haute école spécialisée bernoise est composé de différents projets de recherche menés depuis bientôt dix ans par la BFH. Ils sont soutenus par l’industrie et les hôpitaux, ainsi que par Innosuisse, l’Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation (ex-CTI) et le Fonds national suisse (FNS). La volonté est bien présente et de nouvelles idées germent déjà dans les têtes des chercheurs et de leurs partenaires industriels, pour réaliser d’importantes innovations médicales en coopération interdisciplinaire.
 
Le centre BFH Technologies en sport et médecine
Le centre BFH mise sur la microélectronique pour la miniaturisation et sur la mesure sans contact avec des capteurs optiques. Il développe la robotique et innove dans le traitement des signaux et la technologie des capteurs. C’est un terrain propice au développement de produits avec des partenaires industriels. La branche enregistre, dans le monde entier, des taux de croissance supérieurs à la moyenne, en raison de l’évolution démographique, des progrès de la médecine et de l’élévation du niveau de vie.

www.bfh.ch|humantec

 
 
Prof. Marcel Jacomet

Haute école spécialisée bernoise
Centre BFH Technologies en sport et médecine
2502 Bienne
Tél. 032 321 62 41
marcel.jacomet@bfh.ch
www.bfh.ch
 

*Journaliste science + technologie