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28 septembre 2020 | La Revue POLYTECHNIQUE | Recherche médicale

Une avancée dans la compréhension de la migraine

Georges Pop

Une étude menée conjointement par l’Institut de Pharmacologie et Toxicologie de l’Université de Zurich et l’Université de Padoue a mis en évidence le rôle essentiel des astrocytes, des cellules cérébrales en forme d’étoile, dans l’apparition d’un certain type de migraine. Les conclusions de cette étude annoncent peut-être, à terme, de nouveaux traitements pour les patients souffrant de cette pathologie.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime que 14 % de la population mondiale a été ou sera atteinte de migraine, à un moment ou l’autre de sa vie. Cette affection chronique invalidante est trois fois plus fréquente chez les femmes que chez les hommes.

 

Migraines

L’Organisation mondiale de la Santé estime que 14 % de la population mondiale a été ou sera atteinte de migraine à un moment ou l’autre de sa vie.

L’équipe de Mirko Santello, chercheur en neuropharmacologie de l’Université de Zurich (UZH), en collaboration avec des scientifiques de l’Université de Padoue, s’est penchée sur les causes de la migraine hémiplégique familiale de type 2 (FHM2), causée par une mutation génétique et héréditaire. Dans une étude publiée cet été, les scientifiques suisses et italiens constatent qu’un dysfonctionnement des astrocytes, des cellules gliales du système nerveux central qui assurent, notamment, la protection des neurones, favorise et amplifie un certain type de migraine.

Des astrocytes déficients

Dans son communiqué, l’Université de Zurich souligne que le rcortex cingulaire joue un rôle central dans l’apparition d’une migraine. Plusieurs études ont déjà mis en évidence le rôle joué dans les douleurs chroniques par les cellules non neuronales du système nerveux central, comme les astrocytes. Celles-ci sont, en particulier, responsables d’éliminer les neurotransmetteurs produits en excès par les neurones, surtout le glutamate, le neurotransmetteur excitateur le plus important du système nerveux central. Or, c’est précisément cette fonction qui est réduite dans le cas de la FHM2, si bien que les neurones du cortex cingulaire sont beaucoup plus excitables qu’en temps normal. De ce fait, ils produisent encore plus de neurotransmetteurs, ce qui favorise la survenue d’une migraine de type 2.

Les scientifiques, impliqués dans cette recherche, ont également démontré sur des souris génétiquement modifiées, que la fréquence des migraines est sensiblement amplifiée par le dysfonctionnement des astrocytes. « En dépit de leur abondance, les astrocytes ont été relativement négligés par les neuroscientifiques. Or, ces cellules sont extrême- ment importantes pour éliminer les émetteurs libérés par les neurones. Nos chercheurs ont pu prouver que dans le cas de la migraine dite ‘familiale’, les astrocytes sont incapables de supprimer les transmetteurs surabondants libérés par les neurones », explique Mirko Santello.

Des conclusions potentiellement prometteuses

Principale co-autrice de l’étude à l’Université de Zurich, la scientifique Jennifer Romanos relève pour sa part qu’«en manipulant les astrocytes dans le cortex cingulaire, nous avons pu inverser leur dysfonctionnement. Cela a empêché une aggravation de la douleur à la tête chez les souris porteuses du défaut génétique ». Selon Mirko Santello, « les résultats obtenus fournissent un exemple clair de la façon dont le dysfonctionnement des astrocytes, produit par un défaut génétique, affecte l’activité neuronale et la sensibilité aux déclencheurs de douleur à la tête».

astrocyte

Un dysfonctionnement des astrocytes – des cellules gliales du système nerveux central – favorise et amplifie un certain type de migraine.

L’équipe italo-suisse estime que ses conclusions vont aider à mieux comprendre la pathophysiologie de migraine. Elles suggèrent que le cortex cingulaire représente potentiellement un centre critique de la maladie. « La démonstration du lien entre le dysfonctionnement des astrocytes dans le cortex cingulaire et la migraine familiale pourrait contribuer à concevoir de nouvelles stratégies de traitement de la migraine», déclarent les chercheurs.

L’Organisation mondiale de la Santé classe la migraine au vingtième rang des maladies ayant un impact sur la qualité de vie, mais parmi les dix premières, en prenant en compte uniquement de la population féminine. Près des deux tiers des cas ont un contexte familial. La migraine figure parmi les facteurs de risque cardiovasculaire avérés, avec une augmentation, observée statistique- ment, du risque d’infarctus du myocarde.

Source: Mirko Santello
Institut de Pharmacologie et Toxicologie Université de Zurich mirko.santello@pharma.uzh.ch

www.pharma.uzh.ch