Les centres de données doivent chauffer nos villes
Le nouveau centre de données d’Infomaniak est une innovation mondiale : 100 % de l’énergie électrique consommée par son infrastructure sera valorisée une seconde fois en énergie calorifique pour chauffer jusqu’à 6000 ménages de type Minergie A. Il sera situé dans une zone résidentielle, sous le parc d’un écoquartier et n’aura aucun impact sur le paysage.
Engagé pour la préservation de la vie privée, l’économie locale et l’écologie, ce prestataire suisse est reconnu en Europe comme une alternative éthique et souveraine aux géants du Web. L’entreprise appartient à une partie de ses employés et dépend uniquement de ses clients pour couvrir ses dépenses.
Cet article dévoile des innovations qui devraient devenir la norme pour tout nouveau centre de calculs. Les premiers serveurs seront mis en service cet automne et la production de chaleur sera injectée dans le réseau de chauffage à distance du canton de Genève dès le premier trimestre 2024.
Un centre de données qui revalorise intégralement l’énergie qu’il consomme
Ce nouveau centre de calculs (D4) revalorisera la totalité de l’énergie consommée pour les calculs et le stockage des données. Cette innovation fournira à pleine capacité 12 750 MWh soit l’équivalent de 5500 tCO2 de pellets par an pour chauffer jusqu’à 6000 ménages en hiver et chauffer l’eau chaude sanitaire de près de 100 000 personnes en été :
“Les data centers sont des machines qui transforment l’énergie électrique en énergie thermique. Aujourd’hui, la majorité des data centers relâchent intégralement cette chaleur fatale dans l’atmosphère. Le cloud croît vite; il est vital d’arrêter ce gaspillage. Il faut installer les data centers là où on en a besoin, c’ est à dire à proximité des villes et de réseaux de chauffage à distance, pour que la chaleur dégagée puisse entièrement être revalorisée, ce qui permettra de réduire l’utilisation de centrales à gaz, à bois ou à fioul.”
Boris Siegenthaler, CSO et fondateur d’Infomaniak
Avec ce centre de données, nous visons 100 % de revalorisation de l’énergie consommée. Pour mesurer cela, il existe un indicateur de réutilisation de l’énergie (ERF) qui est le rapport entre l’énergie réutilisée et l’énergie totale consommée par le centre de données. Le D4 aura un ERF de base de 0.95 avec pour objectif de se rapprocher le plus de 1.
Un centre de données qui fonctionne en circuit fermé
Bien que la performance thermique des centres de données soit déjà exceptionnelle, le D4 corrige le plus gros défaut de nos infrastructures existantes et de toutes les installations industrielles : la perte de toute l’énergie consommée sous forme de chaleur dans l’atmosphère.
Au lieu de gaspiller l’air chaud des équipements et des serveurs à 45 °C dans l’atmosphère, ce nouveau data center injectera ce flux dans des pompes à chaleur air/eau qui élèveront la température de 45 °C à 67-82 °C pour s’adapter aux exigences actuelles des installations du chauffage à distance des Services Industriels de Genève (SIG). Comme le centre de données fonctionne comme un système fermé, l’intégralité de l’énergie électrique supplémentaire utilisée pour assurer le fonctionnement des pompes à chaleur est elle aussi entièrement revalorisée.
À l’image d’un frigo qui évacue de la chaleur en fabriquant du froid, l’originalité de ce projet est d’utiliser les deux côtés des pompes à chaleur : d’une part le froid dégagé en élevant la température de l’eau est utilisé pour maintenir l’air qui passe à travers les serveurs autour de 28 °C et d’autre part, la chaleur adaptée est transmise au réseau de chaleur du Canton Genève pour chauffer des ménages et leur eau chaude sanitaire.
En résumé, le dispositif qui revalorise l’énergie est le même qui permet de maintenir l’infrastructure à une température de fonctionnement optimale, sans consommer d’énergie supplémentaire.
“Aujourd’hui, l’indicateur énergétique PUE pour mesurer l’efficacité énergétique des data centers n’est plus suffisant face à l’urgence climatique. Il est primordial de le compléter par l’ERF, ces deux indicateurs devant se rapprocher le plus possible de 1.”
Alexandre Patti, responsable de la conformité chez Infomaniak
Un centre de calculs dans une zone résidentielle qui n’impacte pas le paysage
Le centre de données est implanté au réseau de chauffage d’une zone résidentielle de la ville de Genève. Cette particularité permet de revaloriser sa chaleur durant toute l’année, jour et nuit, été comme hiver.
En plus de son double usage (stockage de données et calculs, d'où production de chaleur), ce nouveau centre de données ne produira aucune nuisance et n’aura aucun impact sur le paysage puisqu’il est enterré sous le parc de l’écoquartier. Cela évite de bétonner des surfaces en dehors des villes pour des bâtiments qui ne servent qu’une seule fonction.
Utiliser une deuxième fois l’énergie renouvelable
Sur le plan financier, l’énergie récupérée sur le data center est offerte aux SIG, l’opérateur de chauffage à distance. Seule l’adaptation à ses températures d’exploitation est facturée, au prix coûtant.
Pour produire les 12 750 MWh qui seront générés par le centre de calculs à pleine capacité, il faudrait brûler 2660 t de pellets par année, ce qui émettrait 5500 tCO2 / an, sans compter les 211 camions / an de 13 t de charge utile (soit un par jour) et les microparticules liées au transport et à la combustion du pellet.
Comme pour toutes les activités d’Infomaniak, ce centre de calculs est exclusivement alimenté par de l’énergie renouvelable. Le mélange d'énergétique est actuellement composé à 60 % d’énergie hydraulique (grands barrages) et 40 % d’énergie renouvelable (petits barrages qui préservent la biodiversité). Avec un développement decentrales solaires d’une capacité de 520 kWc dans l’optique de produire autant d’énergie consommée à terme.
Enfin, ce projet développe la maîtrise technologique et l’autonomie européenne dans l’industrie des serveurs en nuage. Il contribue aussi à développer l’économie locale en créant de la valeur pour les partenaires IT qui accompagnent les entreprises. Dans la mesure du possible, il privilégie aussi systématiquement des fournisseurs suisses et européens :
- Pompes à chaleur Trane (France)
- Ventilateurs Ebmpapst (Allemagne)
- Groupe électrogène Margen (Italie)
- Onduleurs ABB (Suisse)
- Racks des serveurs Minkels (Hollande)
- Tableau électrique Siemens (Allemagne)
- Rails d’énergie Siemens (Allemagne)
- Panneaux solaires Meyer-Burger (Suisse/Allemagne)
Prolonger la durée de vie des serveurs et compenser le CO2 à 200 %
Puisque l'entreprise genevoise utilise uniquement de l’énergie renouvelable, ce qui pollue le plus dans leur activitéest l’achat de nouveaux serveurs. Plutôt que de les remplacer par des serveurs neufs, ils les mettons à jour avec des composants de seconde main, puisés dans l’économie circulaire. Grâce aux technologies de mutualisation et informatique dans les nuages, il est possible de les exploiter jusqu’à 15 ans en assurant une fiabilité et des performances exemplaires.
À terme, notre objectif est de réussir à compenser totalement et concrètement les émissions de CO2 que nous émettons par nos activités l’année qui suit celle où elles sont réellement émises.
Boris Siegenthaler, CSO et fondateur d’Infomaniak
Concernant la compensation des émissions de CO2 via myclimate, l'entreprise est conscients que les arbres qui sont plantés ne poussent pas en un an et que cette démarche est perfectible, raison pour laquelle elle a décidé de compenser la totalité de nos émissions de CO2 à double pour aller plus loin de la neutralité climatique.
L’industrie du nuage va dans le mur : la neutralité carbone est insuffisante
La promesse des géants du net est d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2025-2040, ce qui n’implique pas forcément une amélioration de l’efficience énergétique ou la revalorisation de l’énergie consommée. En réalité, leurs projets d’infrastructure et d’implantation de centre de claclus soulèvent de multiples problématiques. Même si la pression augmente, les centres de données des hyperscalers ne répondent pas aux défis de notre industrie :
- Pas ou peu de revalorisation énergétique.
- Climatisation des salles de serveurs.
- Alimentation des centres de données par des centrales à charbon.
- Gaspillage de millions de litres d’eau pour refroidir des serveurs.
- Bétonnage de surfaces confisquées à l’agriculture ou à des écosystèmes naturels pour des giga data centers.
- Localisation éloignée des agglomérations, ce qui empêche ou complique la revalorisation de l’énergie.
- Technologies controversées comme les centres de données dans les océans, alimentés par des piles à hydrogènes ou encore refroidis par l’eau des lacs.
Tout cela pour des retombées économiques qui échappent aux économies locales, car elles sont captées par des entreprises basées sur d’autres continents.
Un autre paradigme est possible avec une volonté politique et des lois contraignantes
L’industrie du nuage a un rôle majeur à jouer sur le plan énergétique et de la préservation du climat.
Pour réduire l’impact de notre industrie, il est impératif de fixer des lois contraignantes aux acteurs suivants :
- Les entreprises qui construisent des data centers
- Les prestataires qui louent et exploitent les capacités informatiques des data centers
- Les autorités qui accordent les permis de construire des nouveaux centres de calculs
Les autorités doivent fixer des seuils sur :
- L’efficience énergétique des data centers, pour cesser ou réduire la climatisation des salles de serveurs.
- La revalorisation de l’énergie consommée par les data centers, pour stopper un gaspillage énergétique énorme.
- L’emplacement des centres de calculs pour réduire leur empreinte au sol et assurer la revalorisation intégrale de l’énergie qu’ils consomment, été comme hiver).
Au moment de choisir son prestataire IT, il est important de privilégier des opérateurs dont les efforts sont à la hauteur des enjeux environnementaux qui font face :
- Revalorisation de l’énergie toute l’année avec un ERF proche de 1
- Efficience énergétique maximale avec un PUE proche de 1
- Centres de données proches des villes et enterrés
- Compensation des émissions de CO2 à 100% ou plus
- Usage d’énergies renouvelables exclusivement
- Serveurs et équipements utilisés le plus longtemps possible
“L’objectif de ce data center est d’être réplicable dans notre industrie et ce savoir-faire ne sera pas vendu. Il s’agit de notre 4e data center depuis 2000 et l’objectif est à chaque fois d’aller plus loin pour réduire notre impact sur le climat et la biodiversité.”
Boris Siegenthaler, CSO et Fondateur d’Infomaniak
Soutenir les prestataires vertueux et établir des lois plus contraignantes permettra d’accélérer la disparition des technologies obsolètes pour assurer un nuage de serveurs plus durable et vertueux pour l’économie locale.