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28 septembre 2020 | La Revue POLYTECHNIQUE | Espace

La Chine affiche ses ambitions spatiales

Georges Pop

À l’occasion du 50e anniversaire du lancement du premier satellite chinois, le 24 avril dernier, l’Agence spatiale chinoise (CNSA) a  exposé son ambitieux programme pour la prochaine décennie : édification d’une grande station spatiale, vol habité vers la Lune, mission d’exploration robotique de Mars, puis vol habité vers la planète rouge. Autant d’objectifs qui semblent à la portée de la troisième puissance spatiale mondiale, après le double succès de son plus récent lanceur Longue-Marche 5B, ainsi que du prototype expérimental de son nouveau vaisseau spatial, capable d’emporter jusqu’à six astronautes.

Atterrissage du nouveau vaisseau spatial chinois le 8 mai 2020

Symbole des ambitions spatiales chinoises, le nouveau vaisseau spatial, lancé sans équipage à bord, s’est posé sur Terre le vendredi 8 mai, après sa mission d’essai. (© CNSA)

Conformément à son calendrier, exposé un mois plus tôt, la Chine a franchi, en mai dernier, une nouvelle et importante étape vers l’établissement d’une grande station spatiale sur le modèle de la Station spatiale internationale (ISS), prélude à des vols habités vers la Lune, ainsi qu’à l’exploration de la planète Mars. Lancé le 5 mai depuis  la base de Wenchang, sur l’île de Hainan, par la fusée Longue Marche-5B, dont c’était le vol inaugural, un vaisseau spatial d’un type nouveau s’est posé sans encombre, à vide, trois jours plus

tard, dans le nord du pays. Ce double succès technologique a été  quelque peu terni par la descente incontrôlée de l’étage principal de la fusée. Il rend toutefois possible la poursuite du programme spatial de l’Empire du Milieu, qui entend contester la position dominante de ses rivaux américain et russe dans la course à l’espace.

Une capacité de 22 tonnes

Le nouveau lanceur de la famille Longue Marche mesure 53,7 m de haut, l’équivalent d’un bâtiment de 18 étages. Il est dotée d’un étage central de 5 m de diamètre, de quatre propulseurs d’appoint de 3,35 m de diamètre, ainsi que d’un carénage de 20,5 m de long et de 5,2 m de diamètre. Selon la presse chinoise, il offre une capacité de 22 t en orbite basse, un peu plus que celle de la future fusée européenne Ariane 6 (21,6 t), dont le vol inaugural est prévu en septembre de cette année. Le lanceur Longue Marche-5B sera principalement utilisé pour placer en orbite les modules de la future station spatiale chinoise.

Les données techniques précises du nouveau vaisseau spatial n’ont pas été fournies par l’Agence spatiale chinoise. Elle s’est contenté d’indiquer que le nouveau véhicule est plus rapide, plus résistant à la chaleur, et qu’il a la capacité d’emporter jusqu’à six membres d’équipage, au lieu de trois actuellement à bord des vaisseaux Shenzou, construits sur le modèle des Soyouz russes. Le vaisseau, partiellement réutilisable, est conçu pour rejoindre la future station spatiale chinoise, puis permettre des vols habités vers la Lune.

Selon Andrew Jones, analyste du programme spatial chinois pour le site de référence SpaceNews, cette double réussite témoigne clairement des ambitions chinoises. « Le retour réussi du vaisseau depuis une orbite haute montre que la Chine est capable d’envoyer des équipages au-delà de l’orbite terrestre basse. Jusqu’à présent, seule la NASA a été capable de le faire », a-t-il souligné.

Une station opérationnelle en 2022

Après l’abandon de l’ISS, prévu vers 2024, la station spatiale chinoise sera, très vraisemblablement, la seule infrastructure spatiale habitée en orbite autour de la Terre. Prévue pour fonctionner pendant au moins une dizaine d’années, elle sera composée de trois modules : le principal, de 17 m de long, servira d’espace de vie et de travail aux astronautes. Deux modules annexes seront destinés à diverses expériences scientifiques. Selon le calendrier officiel, la station, baptisée Tiangong (Palais céleste en mandarin), devrait être opérationnelle dans le courant de l’année 2022. La mise en orbite des premiers modules est prévue avant la fin de l’année.

Quant à la Lune, Pékin espère y envoyer un homme dans une dizaine d’années puis, plus tard, y installer une base permanente. En janvier 2019, la Chine est devenue le premier pays au monde à faire atterrir une sonde sur la face cachée de notre satellite naturel.

Objectif Mars

En novembre 2019, la Chine a testé avec succès l’atterrisseur de sa future mission martienne.

En novembre 2019, la Chine a testé avec succès l’atterrisseur de sa future mission martienne. Attaché à des câbles, l’engin, en forme d’araignée à quatre pattes, a procédé à diverses manoeuvres pour simuler sonarrivée sur le sol martien. (© CNSA)

Baptisée Tianwen-1 (Question au ciel), la mission robotique chinoise sur Mars est annoncée pour le printemps 2021. Elle consistera à poser un atterrisseur, ainsi qu’un véhicule d’exploration dans la plaine Chryse Planitia, non loin des sites d’atterrissage des missions américaines Viking 1 et Mars Pathfinder. En novembre 2019, la Société des sciences et technologies aérospatiales de Chine (CASC) a testé avec succès l’atterrisseur de la mission, devant un groupe de journalistes étrangers, invités pour l’occasion.

Attaché à des câbles, à 140 m de hauteur, l’engin, en forme d’araignée à quatre pattes, a procédé à diverses manœuvres pour simuler son arrivée sur le sol martien. Selon les informations fournies par les Chinois, le véhicule martien à six roues sera mu par l’énergie solaire. Sa mission devrait durer trois mois. Une deuxième mission est prévue aux alentours de 2030, dans le but de ramener sur Terre des échantillons de la surface martienne.

Si elle parvient à poser un engin sur Mars, la Chine deviendrait le troisième pays à le faire après l’URSS et les Etats- Unis. Pékin ne cache pas son intention d’envoyer un jour des hommes sur la planète rouge. Les Chinois se gardent cependant bien d’avancer une date.

Administration spatiale nationale chinoise www.cnsa.gov.cn/english/