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15 novembre 2017 | La Revue POLYTECHNIQUE 09/2017 | Électrotechnique

Conception d’alimentations pour applications médicales

Alfred Lorenz* et Andreas Glaser**

La première question qui se pose lorsqu’il s’agit d’alimentations, c’est celle de la fabriquer ou de l’acheter. Dans la technique médicale notamment, un secteur très critique en matière de sécurité, il est souvent plus facile d’avoir recours à des alimentations déjà certifiées et contrôlées. Mais ce choix nécessite la plus grande précaution – surtout lorsque les principales normes ont été révisées.
La protection du patient et celle de l’opérateur sont toujours la priorité numéro un lors du développement d’équipements médicaux. Les normes de sécurité, quant à elles, changent en fonction de l’application, de la proximité avec le patient et les opérateurs, ainsi que du site et de l’environnement. Elles sont d’ailleurs nettement plus strictes que pour les applications industrielles. Vient s’y ajouter le fait que les dispositifs médicaux fonctionnent généralement avec des tensions de signal très basses et sont donc sensibles aux interférences électromagnétiques (IEM). La compatibilité électromagnétique (CEM) représente ainsi un thème majeur dans les applications médicales.

 
 
Protéger le patient et l’opérateur
Les patients sont souvent affaiblis et réagissent donc moins bien aux courants de fuite superficiels dangereux, que les personnes saines. Les courants de fuite superficiels admissibles dans les dispositifs médicaux se situent donc dans une plage de quelques microampères à quelques centaines de microampères, en fonction des patients concernés. Ils sont donc bien inférieurs à ceux applicables à l’industrie.
Autrefois, les dispositifs médicaux étaient catégorisés, dans leur ensemble, en fonction du domaine d’utilisation. Aujourd’hui, cette classification dépend des parties appliquées, c’est-à-dire des composants éventuellement en contact avec le patient. La liste ci-après cite les différentes catégories et donne des exemples de dispositifs médicaux avec les parties appliquées correspondantes.
 
Le courant de fuite à la terre arrive de l’alimentation et va dans le conducteur de protection (PE) en passant par ou sur l’isolation, et non pas par le patient ou l’opérateur qui le touche. (Source: TDK-Lambda)
 
 

Type B.Une partie appliquée de type B (Body, en contact avec le corps) n’a pas pour objectif de transmettre du courant au patient; mais cette transmission reste possible - dans les distributeurs automatiques de médicaments dans la salle des infirmières ou les éclairages dans les salles d’opération, par exemple.
Type BF.Une partie appliquée de type BF (Body Floating, contact avec le corps et flux de courant) est reliée au corps du patient afin de transmettre de l’énergie électrique ou un signal électrophysiologique au corps ou depuis le corps (ECG, par ex.).
Type CF.Une partie appliquée de type CF (Cardial Floating, contact avec le cœur et flux de courant) est reliée au corps du patient afin de transmettre de l’énergie électrique ou un signal électrophysiologique au corps ou depuis le corps, dans le cadre d’une application directe sur le cœur (stimulateurs cardiaques externes, par ex.).
 
Amendements de la norme pour les standards de sécurité
Les exigences spécifiques posées aux équipements médicaux se reflètent dans les normes internationales. Dans la plus grande partie du globe, y compris en Europe et en Amérique du Nord, c’est la norme CEI 60601-1 qui détermine les standards de sécurité des alimentations pour la technique médicale. Les normes américaines et européennes telles que UL, CSA et EN sont toutes dérivées de la Commission électrotechnique internationale (CEI).
En Europe, c’est la 3e édition de la norme EN 60601-1 qui est applicable depuis juin 2012. Elle a été à l’origine de nombreuses nouveautés, et surtout de l’obligation d’établir une procédure de gestion des risques et de sauvegarder les données et les documents conformément à la norme ISO 14971.
L’application de la norme internationale dans le droit national a donné lieu à de nombreuses marges d’interprétation, avec pour conséquence des réglementations différentes dans des pays comme le Japon, la Chine, l’Inde ou encore Singapour. Désormais, l’édition 3.1 (A1:2013) est en cours et sera obligatoire à partir du 1er janvier 2018. Dans le cadre de cet article, il n’est pas possible de revenir sur les détails des différentes éditions de la norme CVEI 60601-1. Il est toutefois important de savoir que la nouvelle édition de cette norme aura une influence sur la conception des alimentations pour les applications médicales.
 
Le modèle CUS350M –350W de TDK-Lambda. (Source: TDK-Lambda)
 
 

Principale prescription: une isolation fiable
La principale prescription de la norme CEI 60601-1 est l’isolation fiable et efficace entre l’entrée secteur, les étages internes haute tension et la sortie à tension continue. Une isolation efficace repose sur différents critères, notamment l’écart entre les conducteurs et les composants électriques. Dans ce cadre, la norme CEI 60601-1 définit des distances minimales qui sont nettement supérieures aux exigences dans l’industrie.
Outre des écarts adéquats entre les conducteurs et composants, une isolation de protection fiable joue également un rôle prépondérant. La plupart des alimentations médicales modernes se servent d’une isolation de protection double ou renforcée, dont l’efficacité est prouvée par des essais de rigidité diélectrique. Dans le cadre de ces essais, l’isolation est soumise à une tension nettement supérieure à celle qu’elle devra subir en fonctionnement normal pour garantir qu’elle ne rompra pas.
 
Des exigences différentes
Dans ce cas aussi, les exigences posées aux alimentations médicales et aux alimentations normales sont différentes. Une isolation renforcée ou double dans les alimentations pour une tension secteur de 240 V AC, par exemple, doit présenter une résistance diélectrique de 4 kV AC pour les applications médicales, alors qu’elle n’est que de 3 kV AC pour les applications industrielles. Les alimentations développées avec une séparation inférieure à 4 kV AC s’utilisent aussi dans les applications médicales, où elles font partie d’une isolation renforcée à condition que cette isolation soit considérée comme complémentaire dans l’alimentation. Dans ce cas, le fabricant du produit fini (dispositif médical) doit prévoir une isolation supplémentaire pour répondre aux exigences de protection d’isolation renforcée entre le courant secteur AC et le patient.
La 3e édition de la norme CEI 60601-1 fait désormais la différence entre les exigences posées aux appareils en contact avec le patient et ceux en contact avec le personnel opérateur. Les termes MoPP (Means of Patient Protection) et MoOP (Means of Operator Protection) sont nouveaux à cet égard. Les exigences de sécurité posées aux appareils avec MoPP restent très strictes, alors qu’elles ont été réduites pour les appareils MoOP et sont environ égales à celles de la norme CEI 60950-1.
 
Une conception astucieuse
La limitation élevée des courants de fuite superficiels associée aux exigences strictes posées au déparasitage place les développeurs d’alimentations devant un énorme défi, les filtres IEM nécessaires requérant en effet toujours des courants de fuite superficiels. Le courant de fuite à la terre maximal admissible s’élève à 300 µA en fonctionnement normal et 500 µA en cas de défaut interne dans le terminal. L’objectif de chaque conception est donc de trouver le compromis parfait entre comportement CEM et le courant de fuite.
La meilleure solution consiste à créer une conception astucieuse qui réduit les perturbations CEM au strict minimum et donc d’utiliser des courants de fuite superficiels minimaux dans la filtration. Comment y arriver ?
Les principales sources de perturbations CEM dans une alimentation proviennent des étages de commutation cadencés à plus de 100 kHz en association avec les capacités parasites entre les éléments de commutation et la terre ou entre les circuits primaires et la sortie.
 
Optimisation des alimentations électriques médicales
Les transistors à effet de champ (FET) utilisés comme éléments de commutation dans les blocs d’alimentation modernes sont généralement conçus afin de commuter rapidement pour minimiser les pertes. Malheureusement, l’élément de commutation produit des parasites de plus en plus forts lorsque la vitesse de commutation augmente.
Les dernières conceptions d’alimentation ralentissent donc la commutation de manière ciblée. Des circuits de commutation spécifiques garantissent, par une commutation à zéro volt (Zero-Volt-Switching, ZVS), que cela ne nuise pas au rendement. Les commutations ZVS permettent une commutation rapide des transistors, mais agrandissent les passages de tension (temps d’augmentation et de chute) de 20 ns initialement, à environ 100 ns. Elles réduisent donc les perturbations électromagnétiques générées. Il suffit, par conséquent, d’avoir un petit filtre CEM avec des courants de fuite à la terre minimaux.
Un autre avantage de la commutation ZVS réside dans le fait qu’il est inutile d’utiliser un enroulement blindé dans le transformateur, une autre technologie généralement utilisée pour améliorer la CEM. Le fait de renoncer à ce bobinage blindé permet non seulement l’utilisation d’un transformateur plus petit en réduisant la taille totale de l’alimentation, mais augmente aussi le rendement.
 
Le meilleur compromis possible
Les fabricants d’alimentations ont donc la lourde tâche de trouver le meilleur compromis possible entre efficacité, la compatibilité électromagnétique et taille. Pour les utilisateurs, les solutions évolutives - et donc les alimentations évolutives - sont souvent essentielles pour s’ajuster aux différentes classes de puissance du terminal. La puissance peut ainsi être fortement augmentée par une fonction de ventilateur sur des alimentations de même forme. L’utilisateur économise ainsi des modifications importantes (support mécanique, par ex.) en matière de conception et peut garder la même forme tout en augmentant la puissance. On s’en aperçoit facilement sur la nouvelle série CUS-M de TDK-Lambda.
 
Une nouvelle série d’alimentations
Le modèle CUS200M propose en effet une puissance de sortie de 200 W avec refroidissement par convection et atteignant 250 W avec refroidissement par ventilateur sur une surface de base de 76,2 x 127 mm (3 x 5 pouce). Il est également doté d’une alimentation de secours de 5 V/1 A. Cette fonction permet d’allumer et d’éteindre l’appareil, mais également d’assurer l’alimentation de commandes qui doivent rester alimentées lorsque l’alimentation électrique est éteinte.
Le modèle CUS350M propose une puissance de sortie de 350 W pour un refroidissement par convection sur une surface de base de 87 x 190 mm (3,4 x 7,5 pouce) et un rendement allant jusqu’à 94 %. La puissance de sortie peut même être accrue à 420 W avec un flux d’air de refroidissement très faible.
L’appareil est fourni dans une équerre en U en aluminium, qui améliore le refroidissement des composants. Grâce à cette technologie, il est possible d’ajouter des fonctions essentielles aux alimentations, sans pour autant en modifier les dimensions. Elles mettent alors à disposition une tension auxiliaire (5 V/500 mA), une alimentation de 12 V/300 mA pour un ventilateur externe, par ex., des raccords Sense et un signal Power Good.
Tous les appareils peuvent être utilisés sur le patient, car ils disposent d’une protection du patient entre l’entrée et la sortie (2MoPP), l’entrée et la terre (1MoPP), ainsi qu’entre la sortie et la terre (1MoPP). Ils sont compatibles avec les applications BF. L’énergie absorbée à vide est inférieure à 0,5 W sur tous les appareils.
 
Des solutions évolutives pour transformer l’énergie
Les nouvelles alimentations de TDK-Lambda sont disponibles chez le distributeur Rutronik. Les clients peuvent également commander, dans la rubrique RUTRONIK POWER, tous les autres composants requis pour la création de solutions évolutives pour transformer l’énergie, la commuter et relier des charges résistives, capacitives ou inductives. Une attention toute particulière est toujours portée à la création de solutions système complètes, permettant aux fabricants de dispositifs médicaux de considérablement améliorer leurs délais de commercialisation.
Dans le secteur des semi-conducteurs haute performance, la largeur de bande Rutronik POWER va des composants discrets aux produits hautement intégrés, les circuits imprimés de puissance, ainsi que les modules de puissance. Ils sont complétés par des blocs d’alimentation prêts à brancher, des adaptateurs de bureau, des blocs à cadre ouvert ainsi que des alimentations ATX, des condensateurs avec les technologies les plus courantes, des composants inductifs tels que des bobines, restricteurs, inductances, ferrites, filtres CEM, transformateurs LAN, PCB et SMPS, des résistances linéaires et non linéaires, des connecteurs et câbles, ainsi que des relais, batteries, films, interrupteurs et outils de gestion de la chaleur.
 
RUTRONIK Elektronische Bauelemente AG
1400 Yverdon-les-Bains
Tél. 024 423 91 40
www.rutronik.com

 

* Chef de produits, TDK-Lambda Germany GmbH

* Directeur marketing, Rutronik Elektronische Bauelemente GmbH