18 décembre 2015 |
La Revue POLYTECHNIQUE 12/2015 |
Éditorial
Éditorial (12/2015)
Un bilan mitigé, mais des projets ambitieux
L’année qui se termine a, hélas, davantage été marquée par des attentats terroristes que par de grandes découvertes scientifiques. Même si l’expérience LHCb du CERN a permis de mettre à jour de nouvelles particules – les pentaquarks –, son retentissement n’a pas été comparable à celui du boson de Higgs, il y a trois ans. Ce sont plutôt les exploits du robot Philae et des détecteurs de la sonde Rosetta qui ont fait la une, avec notamment l’oxygène moléculaire trouvé dans la queue de la comète. Parmi les événements qui font froid dans le dos, on citera la découverte d’un nouveau virus géant dans le pergélisol sibérien, tout comme la résistance accrue de certaines bactéries aux antibiotiques trop largement utilisés.
La controverse sur la sensibilité aux ondes électromagnétiques a également marqué l’année écoulée. Pour la première fois en France, une personne a obtenu l’allocation handicapé en raison d’un syndrome d’électro-hypersensibilité. L’OMS a toutefois précisé que ce dernier est non spécifique, c’est-à-dire qu’il pourrait avoir une autre affection pour cause.
Plusieurs thèmes ont fait l’objet de recherches intensives, mais sans résultats probants. On pense, bien sûr, à la masse manquante de l’Univers. Le laboratoire souterrain du Gran Sasso a inauguré, le 11 novembre dernier, l'expérience Xenon 1T destinée à piéger ces particules mystérieuses qui n’émettent, ni ne réfléchissent la lumière, n’interagissant que par la gravitation. La quête de la matière noire est donc actuellement l’un des principaux objectifs du LHC, le grand collisionneur du CERN. Dans sa nouvelle configuration bien plus puissante qu’auparavant, il va tenter de déceler, lors d’une collision de protons, un défaut d'énergie synonyme de trace de cette particule fantôme.
Le mystère de la disparition de l’antimatière n’a pas non plus encore été percé. Malgré la tentative des chercheurs de l’équipe STAR sur l’accélérateur de particules RHIC de Brookhaven, qui ont mesuré pour la première fois l’écart entre les forces agissant sur deux protons et celles opérant sur deux antiprotons, on ne comprend toujours pas pourquoi l’antimatière a disparu à la genèse de l’Univers.
Les ondes gravitationnelles font également l’objet des recherches des physiciens. Le satellite LISA Pathfinder de l’Agence spatiale européenne a été lancé le 3 décembre. Il doit permettre de valider les technologies retenues pour le projet eLISA, dont le but est de détecter ces ondes qu'Einstein avait prédites, il y a cent ans.
Quant aux théories d’unification, telles que celles des supercordes, de MOND ou de la gravité quantique à boucles, elles resteront encore longtemps du domaine des mathématiques et de la physique théorique, en raison de l’impossibilité d’appréhender la matière dans les dimensions de l’infiniment petit.

par Michel Giannoni