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25 mai 2016 | La Revue POLYTECHNIQUE 05/2016 | Éditorial

Éditorial (5/2016)

Entreprises et communication

En guise d’introduction pour cet éditorial, j’aimerais paraphraser une citation de Félix Lagorio, à l’époque consul de France en Crimée (destitué à l’instauration de la Monarchie de juillet), dans son ouvrage «Abrégé historique des révolutions et du commerce de la Tauride», imprimé à Odessa en 1830 et dédié au comte Woronzof: «Les peuples heureux n’ont pas d’histoire». Et voici ma paraphrase: «Les entreprises prospères n’ont rien à communiquer».
En effet, ce n’est souvent que lorsqu’une entreprise licencie massivement, est absorbée, délocalise ou ferme ses portes que l’on entend enfin parler d’elle dans les médias. C’est comme grêle après vendanges. Les Suisses, c’est bien connu, sont modestes et discrets. Ceci est tout spécialement valable pour nos PME. Elles estiment que ce qui se passe chez elles n’intéresse personne et elles appliquent avec succès la politique du secret. Pour cette raison, rien ne filtre de leurs activités: pas de communication, si ce n’est de temps à autre une bouffée de prospectus ou une information factuelle à caractère purement commercial relative à un nouveau produit. Et puis un jour, en principe celui de leur fermeture, on apprend brusquement tout sur elles: leur histoire, leur développement, l’évolution de leurs produits, leurs échecs et réussites. C’est navrant. Souvent dans le cadre de mon activité journalistique, j’ai rencontré des responsables d’entreprises qui s’excusaient de leur carence en matière de communication, arguant leur manque de temps ou de disponibilité. L’un d’eux m’avait même précisé: «Nous n’avons pas d’écrivain chez nous»; ce qui m’a laissé sous-entendre la fin non formulée de sa déclaration: «… nous avons d’autres chats à fouetter». Nombre de responsables d’entreprises estiment en effet que la communication constitue un luxe superflu que seules les grandes multinationales peuvent s’octroyer. Résultat: certaines publications techniques et industrielles comportent souvent un nombre disproportionné d’articles émanant des services de presse bien structurés de ces grandes pointures de l’industrie.
Pour cette raison, j’encourage les dirigeants de nos PME à déléguer parmi leurs collaborateurs au moins une personne de confiance qui puisse se consacrer aux tâches de marketing-communication d’entreprise sous toutes leurs formes, ce qui inclut notamment l’information suivie aux medias, en particulier à la presse spécialisée. Ce n’est pas du temps et de l’argent gaspillés. Plusieurs de nos PME suisses ont fait le pas et instauré une politique de communication efficace. Les résultats ne se sont pas fait attendre: la notoriété de ces sociétés, jusqu’alors quasiment inconnues hors du cercle restreint de leur clientèle habituelle, s’est accrue, ce qui s’est répercuté favorablement sur le développement de leurs affaires.
 
par Edouard Huguelet