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31 août 2020 | La Revue POLYTECHNIQUE 05/2020 | Astronomie

La « planète-océan » K2-18 b livre une partie de ses secrets

Georges Pop

L’exoplanète K2-18 b, située à 124 années-lumière de la Terre, est-elle susceptible d’abriter une forme de vie ? Une équipe d’astronomes de l’Université de Cambridge, au Royaume-Uni, le pense raisonnablement dans une étude publiée par The Astrophysical Journal Letters. Elle confirme la présence de vapeur d’eau atmosphérique et estime que la surface de la planète pourrait être entièrement recouverte d’un océan d’eau liquide.
Bien que 2,6 fois plus grosse que la Terre et huit fois plus massive qu’elle, l’exoplanète K2-18 b offre des signes favorables à l’apparition de la vie. Les plus récentes simulations exécutées par les astronomes de l’Université de Cambridge révèlent que la planète pourrait être un « monde océanique », avec de grandes étendues d’eau liquide, sous une atmosphère riche en vapeur d’eau dont les pressions et les températures seraient, peut-être, assez comparables à celles des océans terrestres.

L’exoplanète K2-18 b parcourt une orbite d’une période de 33 jours dans la zone dite « habitable » de son étoile, une naine rouge encore active située dans la constellation du Lion. (© HubbleESA)
Un monde potentiellement « habitable » ?
Également identifiée sous le nom d’EPIC 201912552 b, l’exoplanète K2-18 b a été observée pour la première fois en 2015 par le télescope spatial Kepler. Elle parcourt une orbite d’une période de 33 jours dans la zone dite « habitable » de son étoile, une naine rouge active située dans la constellation du Lion. L’année dernière, des analyses associant les données rapportées par les télescopes spatiaux Kepler, Spitzer et Hubble avaient établi la présence de quantités importantes de vapeur d’eau dans son atmosphère, sans pour autant conclure à son éventuelle « habitabilité ».
Les chercheurs de l’Université de Cambridge ont exploité ces mêmes données pour leurs simulations, dont les résultats ont récemment été publiés dans The Astrophysical Journal Letters. Pour réaliser leurs expériences, ils ont pris en compte la masse, le rayon et les données spectroscopiques disponibles de K2-18 b, afin de déterminer la composition de son atmosphère. Sur la base des premiers résultats ainsi obtenus, ils ont ensuite tenté de comprendre la structure interne et les propriétés thermodynamiques de la planète. À cet effet, ils ont eu recours à divers procédés de modélisation numérique, ainsi qu’à des calculs statistiques.Une atmosphère riche en hydrogène
L’objectif des astronomes était d’établir si de l’eau liquide, nécessaire à l’apparition d’une forme de vie, pouvait ou non exister sous l’atmosphère également riche en hydrogène de l’exoplanète. Ils savaient, en outre, qu’une couche d’hydrogène trop dense témoignerait d’une pression et de températures telles à la surface de la planète, que l’éclosion d’une forme de vie serait impossible. Finalement, leurs résultats ont montré que K2-18 b était un monde « potentiellement hospitalier ».
Les chercheurs ont conclu que la masse de la « coquille » d’hydrogène de la planète pouvait être estimée à une valeur comprise entre un millionième et 6 % de sa masse totale. Le résultat est certes encore peu précis, mais il laisse une marge d’espoir pour l’apparition de la vie, les données les plus basses de la fourchette étant analogues à celles de la Terre. Ils constatent que l’atmosphère de K2-18 b contient entre 0,02 et 14,8 % d’eau et qu’il est tout à fait possible, dès lors, que de l’eau liquide soit présente sur sa surface.


Le télescope spatial James Webb, dont le lancement est prévu en 2021, doit fournir de nouvelles données plus précises sur l’exoplanète K2-18 b. (© NASA)
De l’eau liquide et des hydrocarbures
Selon l’auteur principal de l’étude, l’astrophysicien Nikku Madhusudhan, « Il y a une chance raisonnable que la planète héberge un grand océan sous son atmosphère, à des pressions et des températures similaires à celles des océans de la Terre ». Il indique encore qu’avec ses collègues, il a identifié de petites quantités de méthane et d’ammoniac, mais précise : « Il nous est impossible de savoir si ces hydrocarbures sont le produit de processus biologiques ou non biologiques. »
Les conclusions des astronomes de l’Université de Cambridge montrent en tout cas que la recherche de planètes « habitables » ne doit pas se limiter aux exoplanètes comparables à la Terre. Des planètes du type « super-Terre » ou « mini-Neptune », plus grosses et plus massives peuvent, elles aussi, dans certaines circonstances, être le berceau de processus propices à l’apparition de la vie.
Pour parfaire leurs observations de K2-18 b, les astronomes attendent le lancement, en mars 2021, du télescope spatial James Webb, développé par la NASA avec le concours de l’Agence spatiale européenne (ESA) et de l’Agence spatiale canadienne (ADC), puis, en 2028, celui du télescope spatial ARIEL de l’ESA. Ces deux télescopes, dotés d’instruments ultra-performants, seront capables, peut-être, de révéler les secrets que cache encore ce monde fascinant.

Nikku Madhusudhan
Astrophysicien
Institut d’Astronomie, Université de Cambridge
nmadhu@ast.cam.ac.uk
Tél. +44 1223 655612
  +44 7804 419140