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01 avril 2015 | La Revue POLYTECHNIQUE 02/2015 | Chimie

La polymérisation par irradiation appliquée à l’impression 3D

Mark Macaré*

L’impression 3D, ou fabrication additive, a beaucoup progressé en très peu de temps, aidée dans une mesure non négligeable par les possibilités de la polymérisation UV et EB. Cet article fait le point sur l’état actuel du marché dynamique de l’impression 3D.
Les technologies de polymérisation sous rayonnement ultraviolet (UV) et faisceau d’électrons (EB) sont connues depuis de nombreuses années. Elles permettent le durcissement accéléré et efficace de panneaux ou de revêtements de sol, par exemple, ainsi que d’enduits dans la construction ou – plus récemment – le séchage à grande vitesse d’encres d’imprimerie, en particulier sur les étiquettes et les emballages, ce qui permet d’atteindre des vitesses de tirage plus élevées.

Aujourd’hui, grâce à la technologie UV/EB, il est possible de produire des objets tridimensionnels en plastique à partir d’un fichier numérique. De quoi attiser l’intérêt d’un éventail de secteurs d’activité beaucoup plus large, des dispositifs médicaux aux jouets, en passant par les bijoux de fantaisie, l’électronique et les pièces d’automobiles. Autant de nouvelles applications qui font intervenir la polymérisation par irradiation.
 
 
Un marché en très forte croissance
Selon un rapport du cabinet américain MarketsandMarkets [1] paru récemment, le marché mondial de l’impression 3D, ou fabrication additive - qui recouvre à la fois les imprimantes 3D, les matières utilisées et les pourvoyeurs de solutions - croît très rapidement. Selon les prévisions, il devrait représenter une valeur de 8,43 milliards de dollars d’ici 2020 et connaître un taux de croissance annuel consolidé de 14,37 %, entre 2014 et 2020.
Les revêtements industriels traditionnels – en particulier, les traitements du bois (le plus gros marché global d’utilisation finale) – constituent toujours le secteur en plus forte progression pour la polymérisation UV dans le monde, suivi de l’électronique. Les résines UV elles-mêmes fournissent les propriétés attendues du produit, et la technologie des revêtements a jeté les bases de l’avancée du séchage par irradiation dans le domaine de l’impression 3D. Celle-ci crée aujourd’hui de nouvelles possibilités qui transcendent les simples facteurs de gains de vitesse et d’efficacité, ainsi que de réduction significative des coûts, qui avaient initialement attiré les premiers utilisateurs de la technologie sous ses différentes formes.
 
Le choix du procédé
Le procédé effectif choisi pour l’impression 3D dépend de la méthode à appliquer pour ajouter différentes matières, liquides ou solides, dans le processus de construction d’une structure tridimensionnelle. Les systèmes liquides sont le plus souvent polymérisés par exposition à une énergie UV: dépôt par éjection de la formulation liquide, suivi du durcissement sous rayonnement ultraviolet, puis répétition de ce schéma jusqu’à la finalisation de l’objet.
Le séchage par LED UV constitue un autre développement en cours digne d’intérêt, en ce sens qu’il offre des vitesses de durcissement supérieures, tout en consommant moins d’énergie. Le séchage par laser est aussi une possibilité.
 
La stéréolithographie, ancêtre de la technologique 3D
La stéréolithographie (SLA), la plus ancienne base établie de la technologique 3D, construit un produit couche par couche, avec polymérisation successive par faisceau laser, dans une cuve de polymère liquide. Un dispositif DLP (Digital Light Projection) emploie un projecteur, similaire à ceux utilisés pour les présentations d’affaires, pour projeter une image de la tranche voulue d’un objet dans un récipient contenant un plastique qui réagit à la lumière (photopolymère). La lumière durcit ainsi sélectivement la zone prescrite.
 
L’impression 3D à jet d’encre
L’option la plus récente, la projection de matière ou impression 3D à jet d’encre, superpose, sur une plate-forme, des couches ultraminces d’un polymère éjecté par une tête multibuses, chaque strate étant durcie individuellement sous UV. Ce procédé crée une structure plastique entièrement réticulée, supportée par une matière de type gel permettant la création de géométries complexes et de parties en saillie. Il fournit un résultat très dur et très solide, pouvant combiner différents matériaux de teintes diverses pour une même construction de produit. Il est ainsi possible de réaliser un modèle réduit d’automobile en plastique rigide, avec des pneus en caoutchouc mou. Ces attributs physiques contribuent à faire de l’impression 3D à jet d’encre, moyennant un mix-matières approprié, le procédé de prototypage rapide de prédilection pour un large éventail de secteurs d’activité et d’applications.
 
 

Les applications médicales
L’impression 3D est déjà occupée à remodeler l’industrie des dispositifs médicaux, en particulier d’aide auditive, orthopédiques (prothèses) et dentaires. Elle stimule également le développement de nouveaux produits, grâce à sa capacité à faciliter le prototypage rapide et la création de modèles anatomiques.
Le génie tissulaire humain n’est que l’un des domaines où les avancées actives se multiplient, et les expérimentations dans diverses innovations supplémentaires se succèdent à un rythme soutenu. Bien entendu, les matières mises en œuvre doivent avoir été approuvées et déclarées sûres, à la fois du point de vue de l’exposition limitée de la peau et pour les applications implantables. On n’en dénombre encore qu’une poignée, comme le nylon 11 et le PLA (acide polylactique), pour l’exposition limitée de la peau, ainsi que le titane et l’acier inoxydable, pour les implants. Les avancées prochaines dépendent du résultat des tests réalisés avec des matériaux comme le magnésium, les céramiques et les superalliages.
 
Industrie aérospatiale et marché de l’automobile
L’industrie aérospatiale bénéficie elle aussi de la fabrication additive avec durcissement UV. Ne demandant, par nature, que de très petites quantités de constituants, la technologie peut être très rentable. Elle permet, par ailleurs, une livraison rapide du produit, sans les coûts élevés et les longs délais inhérents à la réalisation de moules industriels de précision et autres fondamentaux d’une fabrication physique.
Pour les mêmes raisons, l’impression 3D, gagne de plus en plus en popularité dans l’industrie automobile également. La création par Opel d’outils et gabarits d’assemblage imprimés sur mesure en 3D, pour aider au positionnement précis de ses pièces et accessoires de véhicules en est un bon exemple. Même les Formules 1 arborent désormais des garnitures de protection imprimées en 3D.
 
Biens de consommation
Bien sûr, les marchés de consommation sont très intéressés à adopter une technologie qui permet de réaliser des produits imprimés professionnels de haute qualité, pouvant même être personnalisés. Aujourd’hui, les rayons des boutiques et magasins regorgent d’automobiles miniatures, d’articles de sports, de bijoux de fantaisie, de bagages, de cadeaux promotionnels, ainsi que de maints autres objets imprimés en 3D.
Le marché de consommation a aussi son propre circuit de production: les imprimantes 3D domestiques – essentiellement basées sur l’extrusion de thermoplastiques – sont des articles très en vogue sur le marché des biens technologiques, mais elles n’offrent bien évidemment pas la précision de résolution et la vitesse des imprimantes 3D professionnelles.
 
Tendances et innovation
Le désir d’obtenir une meilleure qualité et la capacité des machines à imprimer sur un éventail élargi de matériaux sont toujours les principaux moteurs d’innovation. On s’active beaucoup dans le développement de logiciels (capacité de scannage), ainsi que du côté des résines et équipements d’impression à jet d’encre 3D.
L’industrie se focalise aussi sur la mise en adéquation de la technologie de fabrication et des nouveaux matériaux. La mise au point de machines multimatières utilisant les plus faibles quantités de ressources possibles, sans déchets; la fabrication à la demande de produits personnalisés et de petites séries; l’allègement des produits et l’exploitation de la liberté de conception, tant du point de vue de la composition-matières que des géométries; et même, l’implantation de l’impression 3D dans les chaînes de transformation conventionnelles de l’industrie.
La polymérisation UV est un facteur habilitant clé pour l’innovation dans la technologie, car elle offre une voie de création d’outils plus aisée, avec des fichiers moins lourds, une plus grande diversité de matières et de chimies par rapport aux autres options, ainsi qu’un degré de détail supérieur. Au fur et à mesure que le coût de l’électronique grand public diminue, la polyvalence des systèmes UV va continuer à étendre le marché de l’impression 3D.
 

 
Développement durable
Des initiatives importantes sont également prises pour créer une plate-forme durable pour l’impression 3D, tant du point de vue de la collecte des plastiques en vue de leur recyclage et de leur réutilisation pour l’impression 3D, que de la transformation des plastiques recyclés en une ressource majeure de filament consommable pour les imprimantes 3D. Du succès croissant de la technologie découle également un réel besoin d’adopter des normes internationales et européennes concernant la fabrication additive.
Le programme de recherche SASAM [2] de l’Union européenne (Support Action for Standardisation in Additive Manufacturing) a ainsi permis de dégager une première feuille de route pour les activités de standardisation. La 3D Printing Association [3]tisse également la trame d’une infrastructure sectorielle à l’échelon international. Dans ce contexte, les membres de RadTech Europe, forts de leurs compétences et des avantages de la polymérisation par irradiation, se profilent comme d’excellents partenaires sur ce marché en croissance rapide, pouvant produire les chimies, les consommables et les équipements les plus à la pointe, en toute conformité aux normes réglementaires et de sécurité.
 
Un avenir dynamique?
L’impression 3D va-t-elle devenir un concurrent à part entière des techniques de fabrication traditionnelles dans les marchés de masse? La question reste ouverte. La chaîne d’approvisionnement technique du secteur n’en continue pas moins de développer sa capacité de création de produits (ordinateurs portables, tablettes et autres appareils numériques), qui impliquent une fabrication complexe de composants multimatières, à brefs délais et à faibles coûts. La polymérisation par rayonnement UV est, ici, le principal facteur habilitant. Comme dans beaucoup de secteurs majeurs, la polymérisation par irradiation est certainement promise à un avenir dynamique.
 
Références
[1] www.marketsandmarkets.com
[2] www.sasam.eu
[3] www.the3dprintingassociation.com
 
À propos de RadTech
Créée en 1988 en Suisse, RadTech Europe (RTE) est basée à La Haye (Pays-Bas). Elle est l’association sectorielle européenne qui promeut l’usage, le développement et les avantages des technologies de polymérisation par rayonnement ultraviolet (UV) et faisceau d’électrons (EB) pour les marchés des arts graphiques, des adhésifs, de l’électronique, des revêtements industriels, de l’automobile, pour les secteurs médical, dentaire et cosmétique, ainsi que pour une multitude de nouvelles applications émergentes. RTE ouvre l’accès à ses membres à une plate-forme collaborative, axée sur le transfert de connaissances dans le cadre d’événements didactiques et de réseautage et en tant qu’organisme représentatif auprès des parties prenantes.
 

RadTech Europe
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www.radtech-europe.com

 

*Secrétaire général de RadTech Europe