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14 novembre 2012 | La Revue POLYTECHNIQUE 09/2012 | Informatique

L’ordinateur Commodore 64 fête ses 30 ans

James Dettwiler

Le Commodore 64 (C64) est un ordinateur mis sur le marché en 1982, que l’on doit au constructeur Commodore Business Machine. C’est l’une des plus belles réussites de la microinformatique et l’ordinateur le plus vendu de tous les temps à travers le monde. Le C64 initia des millions de personnes à l’informatique, à la programmation et aux jeux vidéo.
Cette année, l’ordinateur Commodore 64, abrégé C64, a fêté ses 30 ans. Si ce nom ne provoque aucune émotion à la jeune génération, les quadras et plus se souviennent avec nostalgie de toute une époque. Le C64 fut présenté pour la première fois en 1982 au Consume Eletronic Show de Las Vegas par son créateur Jack Tramiel de la société Commodore Business Machine.
Malgré un langage de programmation BASIC peu évolué et une extrême lenteur de ses périphériques de stockage, le C64 affichait d’excellentes capacités techniques, qui en feront un ordinateur de choix pour les particuliers et les éditeurs de jeux. Il a rapidement attiré toute une population de passionnés, de programmeurs, de bidouilleurs, qui ont su, année après année, tirer le maximum de son matériel, dépassant sans cesse les limites du possible. Ainsi, on pouvait voir à l’époque de nombreux effets spectaculaires dans des intros pirates ou des démos: rasters, sinus-scroll, vector balls, etc.
 
Caractéristiques techniques
Fabricant Commodore Business Machine
Modèle Commodore 64 (C64)
Année de sortie 1982
Microprocesseur (CPU) MOS 6510 1 MHz
Mémoire vive (RAM) 64 Ko
Mémoire morte (ROM) 20 Ko (BASIC intégré)
Vidéo 320 x 200 en 16 couleurs
Audio SID 3 voies, 8 octaves (Synthétiseur MOS 6581)
 
 

Une des plus belles réussites commerciales de l’informatique
Malgré un grand nombre de machines défectueuses dans les premières livraisons, le C64 se vend de manière incroyable. Fin 1982, les ventes mensuelles du C64 dépassent celles de l’Apple pour s’établir dès mars 1983 à un rythme de plus de 25’000 machines par mois. Vendu 600 dollars (1200 CHF) à l’époque, cet ordinateur est devenu une machine mythique des années 80, qui restera à ce jour l’une des plus belles réussites de la microinformatique et l’ordinateur le plus vendu de tous les temps avec plus de 17’000 millions d’unités écoulées, en excluant le succès des PC compatibles qui vont se standardiser avec le système d’exploitation Windows à partir du début des années 90. Le C64 connaîtra encore diverses évolutions et restera jusqu’en 1987, l’ordinateur de la société Commodore qui s’est le mieux vendu. La production ne s’est arrêtée qu’en 1990 et il sera commercialisé jusqu’à la faillite de la société en 1994.
Moins cher que l’Apple II et surtout que l’IBM PC, le C64 avait pour concurrents le ZX81, le MO5, le TO7-70 et l’Amstrad CPC 464 dans les années 1980. Cet ordinateur comptait une bibliothèque de plus de 10’000 logiciels, dont des jeux mythiques, tels que Bubble Bobble, Arkanoïd ou Boulder Dash, par exemple. Un joli succès qui s’arrêtera assez rapidement à la sortie de l’IBM PC.
 
Des caractéristiques qui font sourire aujourd’hui
Comme son nom l’indique, le C64 possédait 64 Ko de RAM (512 Mo pour un iPhone 4) dont 38 Ko disponibles pour les programmes. Il utilisait le microprocesseur MOS 6510 8 bits, cadencé à 1,023 MHz dans sa version NTSC et 0,985 MHz dans sa version PAL. Une des caractéristiques intéressantes de ce microprocesseur était sa capacité à gérer des bancs de mémoire, en les amenant à la demande dans l’espace d’adressage du processeur. Le C64 n’était pas doté de mémoire de stockage. Les logiciels étaient stockés sur des cassettes audio ou des disquettes, qu’il fallait charger en mémoire avant de pouvoir les exécuter. Par exemple, le chargement d’un jeu pouvait prendre un quart d’heure… Mieux valait ne pas être pressé. De plus, la possibilité de le brancher directement sur un téléviseur dispensait de l’achat d’un écran.
La puce graphique VIC-II offrait une résolution de 320 x 200 pixels, seize couleurs, huit sprites (éléments graphiques qui peuvent se déplacer sur l’écran), deux modes graphiques matriciels (bitmap), des capacités de défilement (scrolling), ainsi que 40 colonnes pour le mode texte standard. Il était possible d’augmenter le nombre de couleurs en descendant à une résolution de 160 x 200.
La puce sonore SID (Sound Interface Device) ou MOS 6581, très avancée pour son époque, était constituée d’un circuit analogique et numérique. Cette puce était un véritable synthétiseur qui gérait tout le son du C64, dépassant technologiquement tout ce qui se faisait à l’époque. Tous les contrôleurs étaient numériques, mais les sorties, quant à elles, étaient analogiques. Cette puce fournissait trois modulateurs, plusieurs formes d’ondes (carrées, triangulaires, dents de scie, pseudo-aléatoire), des capacités de modulations sonores, ainsi que du filtrage. La combinaison  de ces fonctionnalités donnait le grain sonore caractéristique du C64. De plus, cette puce était capable de synthétiser la voix. Cependant, le MOS 6581 avait un défaut lors du changement de volume des oscillateurs, qui se traduisait par une sorte de «pop» sonore. Ce bug fut exploité afin de générer une quatrième voie percussive, des sons numérisés. Malheureusement, dans l’évolution du modèle 6581, ce défaut fut corrigé partiellement sur la génération 8580, ce qui rendait le volume des sons numérisés très faible. La différence principale entre le 6581 et le 8580 se situe au niveau du voltage (12 V contre 9 V). De plus, les parties analogiques et numériques sont davantage isolées sur le 8580, rendant la sortie audio moins distordue et avec moins d’interférences. Les fans préféraient tout de même le son plus particulier du 6581 à celui du 8250.
La présence d’un port série permettait de connecter une magnétocassette, un lecteur de disquettes (5,25’’), une imprimante, un modem, ainsi que des joysticks. Une particularité intéressante du modèle de lecteur de disquette C1541 était le détournement de son processeur pour effectuer des calculs.
Malheureusement, le langage BASIC incorporé n’offrait pas de moyens faciles pour accéder aux capacités graphiques et sonores avancées du C64. Les utilisateurs devaient donc se rabattre sur d’autres langages, tels que l’assembleur ou sur des extensions comme le Simon’s BASIC, afin d’adresser directement la mémoire pour obtenir les résultats désiré.
 
Des émulateurs pour revivre l’époque
Pour revire cette époque, on peut utiliser l’un des nombreux émulateurs pour PC comme Winvice (www.viceteam.org) et pour Mac OS X comme Power64 (www.infinite-loop.at), ainsi qu’une multitude de jeux pour les Smartphones. Des tutoriaux permettent encore d’apprendre les méthodes de programmation et d’utilisation du C64 de l’époque.
 
Le C64 renaît de ses cendres
Après la faillite de Commodore, la marque et ses actifs passèrent de main en en main, jusqu’à ce qu’une jeune pousse, prenant le nom de Commodore USA (www.commodoreusa.net), ait décidé en 2011, de commercialiser un nouveau C64, avec sont boîtier beige d’origine. Cet ordinateur n’est qu’un PC doté d’un processeur Intel Atom, de 4 Go de DDR3, d’un disque dur SATA 1 To, d’une sortie HDMI, d’un lecteur optique (CD, DVD, Blu-Ray en option), le tout disposé dans un châssis de C64. Tirer sur la corde de la nostalgie pour faire craquer les geeks que nous sommes? Ça pourrait marcher… 

 
Jack Tramiel, père du Commodore 64 
Né en 1928 en Pologne, déporté à Auschwitz, libéré par l’armée américaine puis émigré aux Etats-Unis en 1947, Jack Tramiel est mort en avril 2012. En 1955, il fonde à Toronto au Canada, la société Commodore Business Machines. De cette dernière, il fera naître le Commodore 64 et lui associant cette idée que l’ordinateur doit pouvoir entrer dans chaque foyer, à la fois par son prix et son équipement. En 1983, pourtant la meilleure année de l’entreprise, Jack Tramiel est contraint de quitter la société. Ce sera le début d’une nouvelle aventure technologique avec Atari.
CC - Alex Handy