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De la manière d’interpréter les parcours chaotiques des femmes détenues
Jean-Philippe Melchior, Omar Zanna, Cendrine Mercier,
Dans cet article, il est procédé, au prisme du modèle théorique du « parcours social », à l’analyse de 25 entretiens de type compréhensif, réalisés en 2024 auprès de femmes détenues de trois établissements pénitentiaires de la région parisienne. Cette analyse permet de montrer que leurs parcours ont été, tout d’abord, en grande partie conditionnés par des contextes sociaux et des relations familiales problématiques ; puis marqués par des rencontres avec une figure significative les ayant conduites à s’engager dans une direction qu’elles déplorent désormais ; et enfin par une détention qui a favorisé la définition de projets personnels ou professionnes.
Lors d’une recherche menée en 2024 auprès des femmes détenues dans les maisons d’arrêt de Fleury-Mérogis et de Versailles, mais également au centre de détention de Réau, il a été procédé à 25 entretiens de type compréhensif. Ces entretiens portaient sur leur état de santé (sur les versants médical et psychologique), leurs activités physiques et sportives, leurs relations en détention et, pour finir, sur leur parcours de vie. Dans cet article, centré sur la thématique des parcours, il a été montré que les détentions pour des faits délictueux ou criminels s’inscrivent dans des parcours de vie dans lesquels il est possible d’identifier un certain nombre de caractéristiques récurrentes, comme une enfance maltraitée, un rapport compliqué à l’école et/ou un niveau scolaire modeste, une migration, ou encore l’influence exercée par le conjoint ou compagnon. Cependant, comme l’a montré Daly dans son étude sur les parcours criminels des femmes, il est essentiel de nuancer cette vision en prenant en compte la diversité des trajectoires et les facteurs de résilience. Ces caractéristiques ne signifient pas que ces personnes étaient inéluctablement conduites à commettre des actes répréhensibles ou dans l’impossibilité d’échapper à un déterminisme implacable, mais elles ont bien contribué à placer leur vie dans des situations délictueuses.
Pour analyser ces parcours, le modèle théorique du parcours social développé au début des années 2010 dans plusieurs ouvrages, a été mobilisé. Selon ce modèle, tout parcours individuel est à la fois conditionné par les contextes dans lesquels il s’inscrit et marqué par les événements traversés, qu’ils soient d’ordre biographique (rencontres, premier emploi, naissance, décès…) ou d’ordre socio-historique (grands événements, conflits, mouvements sociaux…) et environnemental (catastrophes naturelles).
Le concept de parcours social a donc bien vocation à éclairer l’inscription de l’individu et de son cheminement dans les contextes familiaux et sociaux qui vont en partie conditionner les histoires de vie singulières, même si chaque individu entend réaliser son projet de vie à sa manière. L’enchâssement du parcours des individus dans les contraintes que toute société impose est son premier attribut.
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