Des scientifiques montrent que les puces informatiques pourraient être miniaturisées encore davantage
Werner Siefer
Des scientifiques de l’Institut Paul Scherrer (PSI) ont perfectionné la résolution de ce qu’on appelle la photolithographie. Grâce à leurs découvertes, ils veulent contribuer à faire progresser la miniaturisation des puces informatiques.
Produire les puces comme on produisait des images au cinéma
En 1970, une micropuce pouvait accueillir seulement une centaine de transistors. Aujourd’hui, une puce pas plus grande que le bout du doigt comporte quelque 60 milliards d’éléments. Ces composants sont produits à l’aide d’une exposition appelée photolithographie: un fin disque de silicium, le «wafer», est enduit d’une couche photosensible, appelée résine photosensible ou «photoresist» en anglais. On procède ensuite à l’exposition qui correspond au schéma de construction de la puce et modifie les propriétés de la résine photosensible. Celle-ci devient ainsi soluble ou insoluble dans certains solvants. Les processus suivants éliminent soit les parties exposées (procédé positif), soit les parties non exposées (procédé négatif). Pour finir, il ne reste sur le wafer plus que le motif de câblage souhaité avec les conducteurs.
La lumière utilisée est décisive pour la miniaturisation et des puces toujours plus compactes. Les lois de la physique stipulent que plus la longueur d’onde de la lumière utilisée est courte, plus les structures reproduites peuvent être denses. La «deep ultraviolet light» (DUV) a longtemps été utilisée dans l’industrie. Il s’agit d’une lumière laser avec une longueur d’onde de 193 nanomètres. A titre de comparaison, pour l’être humain, la gamme visible de la lumière bleue s’achève à environ 400 nanomètres.
Depuis 2019, les fabricants utilisent l’«extreme ultraviolet light» (EUV) ou rayonnement ultraviolet extrême avec une longueur d’onde de 13,5 nanomètres, autrement dit raccourcie de plus d’un facteur dix. Cette utilisation permet d’imprimer des structures encore plus fines, jusqu’à 10 nanomètres, voire moins. Au PSI, les scientifiques utilisent pour leurs analyses le rayonnement synchrotron de la Source de Lumière Suisse SLS, qui est adaptée à la norme industrielle de 13,5 nanomètres.
La lithographie photonique permet les résolutions les plus élevées
Les scientifiques du PSI ont perfectionné la lithographie EUV conventionnelle en irradiant l’échantillon non pas de manière directe, mais de manière indirecte. Dans la lithographie interférentielle à miroir UVE (MIL), deux faisceaux cohérents l’un par rapport à l’autre sont réfléchis par deux miroirs identiques sur le wafer. Les rayons produisent ensuite un motif d’interférence avec un modèle qui dépend à la fois de l’angle de la lumière incidente et de sa longueur d’onde. Le groupe a ainsi obtenu des résolutions – c’est-à-dire des distances entre les conducteurs – de 5 nanomètres, et ce en une seule exposition. Au microscope électronique, les conducteurs ont révélé de bons contrastes avec des bords nets.
«Nos résultats montrent que la lithographie EUV permet des résolutions extrêmement élevées ce qui suggère qu’il n’y a pas encore de limites fondamentales, constate Dimitrios Kazazis. C’est un aspect vraiment exaltant qui élargit l’horizon de ce que nous pensions possible. Et cela ouvre de nouvelles voies pour la recherche dans le domaine de la lithographie EUV et des photoresists», conclut Dimitrios Kazazis.
Dès fin 2025: dans une nouvelle chambre EUVL
Pour l’instant, cette démarche n’est pas particulièrement intéressante pour la production industrielle de puces, car comparée aux normes industrielles, elle est très lente et ne peut produire que de simples structures périodiques, et non des concepts de puces. Mais elle offre en revanche une méthode pour mettre au point des résines photosensibles qui seront nécessaires à la future production de puces, et ce avec une résolution qui ne peut être atteinte dans l’industrie. L’équipe prévoit de poursuivre ses recherches avec un nouvel outil EUV à la SLS. Attendu pour fin 2025, ce nouvel appareil sera couplé à la SLS 2.0, que l’on équipe actuellement, et offrira beaucoup plus de performance et de possibilités.
Contact
À propos du PSI
Avec ses 2300 collaborateurs et un budget annuel de CHF 460 millions, le PSI est le plus grand institut de recherche suisse pour les sciences naturelles et les science de l’ingénierie. Il est le site central des grandes installations de recherche suisses. Faisant partie du domaine des EPF, le PSI est un pilier décisif du paysage de la recherche suisse et mène de la recherche de pointe dans les domaines des technologies du futur, de l'énergie et du climat, de l'innovation santé et des fondements de la nature.
De grandes installations de recherche uniques au monde
Le PSI développe, construit et exploite de grandes installations de recherche très complexes basées sur des accélérateurs de particules. Ces installations sont à la disposition de la science et de l'industrie. Des chercheurs de Suisse et du monde entier demandent du temps de mesure dans les grandes installations de recherche du PSI, qui sont uniques au monde dans cette combinaison. Chaque année, quelque 3000 chercheurs invités de Suisse et du monde entier utilisent les grandes installations de recherche du PSI pour leurs travaux de recherche.
Moteur de l'économie et de l'innovation
Le PSI accroît la force d'innovation de la place économique suisse : les entreprises suisses exploitent commercialement les résultats de recherche du PSI, profitent de leur collaboration au développement de nouvelles technologies ou utilisent les installations uniques pour leurs propres recherches. En créant des spin-offs, le PSI transfère en outre ses dernières découvertes scientifiques directement dans l'économie. Il est un employeur important et un moteur de l'innovation dans la région.
Incubateur pour les spécialistes de la prochaine génération
Le PSI produit des spécialistes hautement qualifiés pour la science et l'économie, dont l'engagement dans cet environnement stimulant et fascinant pose les bases de carrières exceptionnelles. Environ un quart des collaborateurs du PSI sont des post-doctorants, des doctorants ou des apprentis.
Thérapie ciblée du cancer par les protons
Le PSI exploite la seule installation de Suisse pour le traitement de cancers spécifiques avec des protons. Ce procédé particulièrement doux permet de détruire les tumeurs de manière ciblée et de laisser les tissus environnants en grande partie intacts.