Relation d’emprise, croyances et schémas cognitifs : le cas de femmes victimes de violences conjugales
Sarah El Guendi
Le présent article propose d’étudier le maintien d’une relation d’emprise conjugale selon les schémas de pensée et les croyances de femmes victimes de violences conjugales. Le premier niveau d’analyse consiste à explorer les modes préférentiels de schémas de pensée selon l’approche centrée sur les concepts et schémas du psychologue Jeffrey E. Young. Le second explore l’ensemble des croyances sous-jacentes et interconnectées qui influent les pensées conscientes, les émotions et les actions intentionnelles des individus.
Les données utilisées à l’appui de cet article ont été collectées par le biais de quinze entretiens individuels auprès de femmes victimes de violences conjugales âgées de 18 ans et plus. Les résultats obtenus indiquent des scripts ou schémas cognitifs relevant des domaines de fonctionnement suivants : 1° Thème du manque d’autonomie et de performance ; 2° Thème du lien et de la relation; 3° Thème du manque de limites ; 4° Thème de l’orientation excessive vers les autres. Ces schémas cognitifs inadaptés (en particulier ceux acquis précocement), une fois activés, favorisent une vision stable et rigide de soi, de son partenaire et de la relation affective.
Le processus d’emprise conjugale repose sur une asymétrie de la relation affective caractérisée par l’ascendant psychologique et/ou physique sur un individu. Selon le contexte et les évènements, la rigidité inhérente à ces schémas de pensée provoque des scripts de comportement, pensées, et sentiments dysfonctionnels. Ces distorsions cognitives sont distinctes de par leur contenu, et par les objectifs qu’elles recherchent, à savoir la justification, le déni, la minimisation, la négation ou la banalisation des violences. De telles croyances dysfonctionnelles contribuent à normaliser ou à légitimer des rapports de pouvoir et de domination au sein du couple. Cette question sur le rôle des schémas de pensée, et plus particulièrement des distorsions cognitives liées à l’acceptabilité et à la légitimation des violences, est centrale pour comprendre le maintien d’une relation d’emprise conjugale.
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