25 juillet 2013 |
La Revue POLYTECHNIQUE 04/2013 |
Rétrospective
Rétrospective (4/2013) – La Revue en 1935
Paul Rudhardt
1869 – 1935
Fondateur et rédacteur en chef de La Revue Polytechnique
Brusquement, le 4 courant, en pleine activité, notre cher collaborateur nous était enlevé.
Né au Petit-Saconnex le 16 février 1869, il fréquanta l’école primaire de la Servette, puis le Collège et l’Ecole de Mécanique de Genève. Mais ses études ne se bornèrent pas là et, par lui-même, travaillant sans cesse à élargir ses connaissances, il les poussa très loin dans les domaines techniques qui l’attiraient plus particulièrement.
Entré à la Compagnie de l’Industrie Electrique et Mécanique de Genève (Ateliers de Sécheron), il devient chef des laboratoires de recherches. Ses travaux portent plus particulièrement sur les courants à haute tension et sur la résistance électrique des matériaux. Il crée divers modèles de parafoudres et de plaques isolantes. Les débuts de la T.S.F. le passionnent et il suit de près les travaux de Brandly dans ce domaine, ainsi que ceux des Curie dans celui de la radio-activité des corps.
Il quitte les Ateliers de Sécheron pour s’intéresser à l’industrie à titre privé.
La guerre et les difficultés qu’elle engendre le conduisent à chercher pour nos produits nationaux de nouveaux débouchés, comme à trouver les moyens d’utiliser plus rationnellement nos propres ressources en matières premières. Le soucis de procurer aux activités du pays un personnel qualifié l’aiguille vers les problèmes de l’orientation professionnelle et il crée l’«Association pour l’organisation rationnelle du travail», «A.S.O.R.T.».
Toujours poussé par son dévouement à la cause commune, il crée en 1916, le «Musée et Office permanent de l’Industrie genevoise».
Il lance l’idée de la Foire Suisse de l’Horlogerie et de la Bijouterie Suisse qui eut lieu à Genève en 1921 et dont la réalisation fut en grande partie son œuvre.
Enfin, dans le même ordre d’idées, il consacre ses efforts à la «Quinzaine Genevoise» et à la «Maison Genevoise», dont il est le secrétaire général. Et c’est dans cette dernière activité que la mort vient le surprendre.
Malgré toutes les tâches qui l’absorbent, Paul Rudhart trouve le temps de nous laisser une œuvre scientifique et littéraire importante: Les isolants; Matériaux électrotechniques non isolants, deux ouvrages qui furent commandés par l’Encyclopédie Electrotechnique: Paris 1912-1916; Mines et carrières; Les combustibles suisses et leur utilisation; Les métaux utilisés dans la technique moderne et leur traitement rationnel; Les produits métallurgiques et leur traitement, ce dernier en collaboration avec Léon Quillet, directeur de l’Ecole centrale des Arts et manufactures; Le Maroc; En Tchécoslovaquie; La Suisse, son importance économique, son rôle international; Le Rhône (en collaboration avec A. Dauzat); La navigation fluviale et les forces hydrauliques en Suisse; Importance de quelques facteurs moraux en orientation professionnelle; une plaquette sur René Thury, qui marque la haute estime dans laquelle il tenait ce savant.
(…)
C’est pendant la guerre que je pris contact pour la première fois avec lui. Il dirigeait alors avec dévouement et compétence l’Office de l’Industrie est ses conseils, comme sa complaisance inépuisable, me furent précieux dans l’élaboration d’un numéro de la revue Schweizerland, consacré à la Suisse romande où l’on traitait largement des activités genevoises, et c’est lui-même qui voulut bien se charger, sous le titre: «L’évolution de l’industrie à Genève», de l’important chapitre réservé à nos industries. Dès ce moment, j’ai pu apprécier les hautes qualités de cet homme universel qui, infatigable autant que désintéressé, était génial pur mener à bien des entreprises qui tout d’abord semblaient devoir se heurter à des difficultés presque insurmontables. Notre collaboration n’a pour ainsi dire pas cessé depuis. En 1918, à cheval sur la fin de la guerre, j’éditais pour lui un livre de grande utilité: Les combustibles suisses et leur utilisation. Malheureusement, ou heureusement, suivant le point de vue auquel on se place, au moment où il parut, après l’armistice, les combustibles suisses, malgré les judicieux conseils donnés pour leur emploi par l’auteur, ne pouvaient plus lutter avec leurs concurrents étrangers. Deux ans plus tard, en 1920, je prenais la direction et l’administration de La Revue Polytechnique, dont Paul Rudhart était le rédacteur en chef depuis le premier numéro, paru le 10 juin 1898, sous le nom de La Machine qu’il avait fondée. Et c’est en plein travail de rédaction que la mort le surprit. Mon collaborateur de chaque instant aimait à me rappeler que durant ces quelques vingt années de travail en commun, puis d’amitié, jamais le moindre nuage n’était apparu dans nos relations et je suis heureux de rendre hommage à son inépuisable bienveillance, à sa serviabilité sans limite. Non seulement d’un désintéressement extrême pour lui-même, ce qui est un des traits les plus caractéristiques et les plus attachants de son caractère, il cherchait encore par tous les moyens que lui donnaient la vivacité de son intelligence, à éviter aux autres le plus de charges possibles.
Je l’ai vu, d’une activité débordante, doué d’une grande facilité d’adaptation, se consacrer simultanément et successivement à une foule d’organismes intéressant le pays. Créateur ou animateur d’expositions, directeur d’instituts scientifiques ou éducatifs et de groupements industriels, partout il se dévoue, donne sans compter son temps et sa peine. Professeur, il fait bénéficier ses élèves de ses larges connaissances. Conférencier, il cherche à répandre le fruit de ses travaux. Il est envoyé en mission à l’étranger et rapporte de France, de Belgique, d’Angleterre, des Balkans et du Maroc des études dont ses concitoyens profitent largement.
(…)
Paul Tremblay
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