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02 novembre 2013 | La Revue POLYTECHNIQUE 08/2013 | Capteurs

Un bracelet révolutionne la prise de tension

Les conséquences d’une tension élevée font partie des causes de décès les plus fréquentes au niveau mondial. Malgré cela, et selon l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, une personne concernée sur deux ne prend pas régulièrement sa tension. Cela tient surtout au fait que les mesures régulières sont fastidieuses. Un nouveau capteur pour le poignet devrait désormais modifier cette situation.
Les patients associent la prise de tension et la surveillance à une expérience désagréable. Une manchette qui s’active toutes les quinze minutes pendant plusieurs heures et comprime la partie supérieure du bras, un appareil de mesure gênant sur le corps, éventuellement même une surveillance invasive pour laquelle un cathéter est introduit dans une artère, voilà les solutions existantes. Il n’est pas étonnant que les personnes concernées évitent cette procédure autant que possible.

Un nouveau capteur, à peine plus grand qu’une montre-bracelet, offrira bientôt une méthode plus agréable pour la prise de tension. La société STBL Medical Research AG (STBL) a développé un appareil, pouvant être porté facilement au poignet et qui enregistre continuellement la tension - sans aucune manchette de pression, ni incision. Plusieurs capteurs placés sur la surface de la peau dans la zone du poignet mesurent simultanément la pression de contact, le pouls, ainsi que le débit sanguin. Michael Tschudin, cofondateur de la société STBL, y voit un grand potentiel: «Cet appareil de mesure peut être employé à des fins médicales, pour la prévention chez les patients à risque ou pour le traitement de l’hypertension, mais aussi comme appareil de mesure de la tension et du pouls, lors d’activités de loisir ou sportives, ainsi que pour la surveillance de la condition physique durant la pratique d’un sport de haut niveau».
 
Les premiers prototypes de la «montre-tensiomètre» avec la bande Empa en fibres piézorésistives.
 

Une augmentation de la précision de la mesure
Pour la mise en œuvre de cette nouvelle technologie, les ingénieurs ont surtout dû maîtriser un obstacle: la pression de l’appareil sur la peau change continuellement, c’est pourquoi d’importantes corrections des mesures étaient nécessaires. La division des céramiques de haute performance de l’Empa a recherché une solution appropriée à ce problème, dans le cadre d’un projet CTI. Un capteur en fibres piézorésistives placé dans le bracelet mesure la pression de contact de l’appareil sur la peau. Si la puissance du signal change suite à un glissement ou à la tension d’un muscle, cela pourrait entraîner des mesures erronées. Le capteur de l’Empa enregistre précisément ces modifications et corrige les valeurs de mesure. Cette fibre conductrice de l’électricité identifie un déplacement ou un changement de pression, puis le transforme en un signal électrique qu’elle transmet à l’appareil de mesure. Grâce à cela, il est possible d’accroître la précision de la mesure de la «montre-tensiomètre» de plus de 70 %. «Nous avons fabriqué le premier prototype il y a quatre ans», explique Frank Clemens, du service céramiques de haute performance de l’Empa. Des tests spécifiques ont confirmé la capacité fonctionnelle des capteurs. Maintenant, l’Empa travaille dans l’objectif d’intégrer le piézo-capteur dans l’appareil de manière à le rendre non seulement plus joli sur le plan visuel, mais aussi à permettre son incorporation de la manière la plus facile et la plus simple possible, par collage, enlaminage ou intégration, par exemple.
 
Un courant électrique traverse continuellement chacune des fibres pour la mesure de la pression de contact. Elles se dilatent et leur résistance électrique se modifie.
 

Une aide d’urgence au poignet
Le marché pour un tel appareil a énormément de potentiel. En effet, les maladies cardiovasculaires sont considérées, au niveau mondial, comme la cause de décès la plus fréquente. Plus d’un milliard de personnes devraient mesurer leur tension chaque jour pour éviter les éventuelles conséquences de leur hypertension. C’est pourquoi 60 à 70 millions d’appareils de mesure sont vendus chaque année, sans toutefois permettre une mesure en continu. Une mesure permanente pourrait, en revanche, offrir une sécurité supplémentaire. Précisément avant l’éventualité d’un infarctus cardiaque ou cérébral imminent, le système serait en mesure d’émettre à temps des signaux d’alerte. Car un infarctus cardiaque ou cérébral est précédé d’une onde de choc plus importante, que le système saisit et évalue. Ainsi, il serait possible de prendre des mesures d’urgence avant que ne se produise un événement à risque. Pour améliorer constamment la précision dans de telles situations, d’autres séries de tests sont prévues sur l’homme.
Cependant, la mesure permanente offre encore bien d’autres avantages, comme l’explique le professeur Thomas Lüscher, directeur de la clinique de cardiologie à l’hôpital universitaire de Zurich et cofondateur de la société STBL: «Cet appareil nous offre la possibilité de mesurer la tension dans l’environnement naturel des patients. Le patient n’est pas limité dans sa liberté de mouvement». La «tension élevée de la blouse blanche», c’est-à-dire la nervosité du patient chez le médecin, qui peut falsifier les mesures, disparaît avec cette nouvelle méthode.
 
Moins cher, plus simple, plus confortable
Des tests cliniques sont en cours. Les premières mesures ont déjà été effectuées parallèlement à une intervention et les résultats sont très prometteurs. Dans un premier temps, le produit sera livré en deux versions: un appareil de surveillance médicale et une variante plus «affinée», un appareil pour le temps libre destiné aux sportifs ou à n’importe qui d’autre. «Le capteur sera moins cher que les appareils de mesure sur 24 heures, tels qu’ils sont actuellement utilisés dans les hôpitaux», confirme Michael Tschudin. De tels appareils coûtent jusqu’à 6000 francs suisses, tandis que la «montre-tensiomètre» coûte environ dix fois moins cher.