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29 mai 2015 | La Revue POLYTECHNIQUE 03/2015 | Économie

Une année 2014 turbulente

L’Industrie suisse MEM (machines, équipements électriques et métaux) enregistre pour l’exercice 2014 un recul du chiffre d’affaires et prévoit des pertes massives sur les marges pour les affaires en cours et à venir.

Au cours du second semestre 2014, la marche des affaires de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM) a stagné en raison de la faible conjoncture en Europe, qui est le débouché principal. Suite à la brusque réévaluation du franc suisse et à l’incertitude concernant l’avenir des accords bilatéraux, notre place industrielle a beaucoup perdu de son attractivité. Il n’est donc pas surprenant que les attentes commerciales des entreprises pour les douze mois à venir se soient détériorées et que les marges se retrouvent à nouveau fortement sous pression.

 
 
Tout entreprendre pour sauvegarder la compétitivité
Les entreprises vont tout entreprendre pour regagner leur compétitivité. Swissmem exige avec insistance de la part des instances politiques et des partenaires sociaux de tout entreprendre aussi pour soutenir les entreprises dans leurs efforts et pour redonner l’attractivité méritée à la place industrielle suisse.
Par rapport à 2014, les entrées de commandes dans l’industrie des machines, des équipements électriques et des métaux (industrie MEM) ont progressé de 4,9 % au total. Cette progression est exclusivement le fruit des résultats du premier semestre. Au troisième trimestre 2014, les entrées de commandes ont stagné et ont diminué de 1,8 % au quatrième trimestre comparées à la même période de l’année précédente. L’évolution du chiffre d’affaires est similaire. Certes, nous constatons sur l’ensemble de l’année une légère croissance de 0,3 %. Cependant, comparé à la même période de l’année précédente, le chiffre d’affaires a diminué au troisième trimestre de 4,2 % et de 2,4 % au quatrième trimestre. Avec un taux d’utilisation des capacités de 88,2 % en moyenne, les entreprises MEM ont dépassé en 2014 la moyenne sur le long terme (86,1 %). Elle atteint son niveau le plus élevé au quatrième trimestre avec 88,8 %.
 
Croissance des exportations modérée
En 2014, l’industrie MEM a exporté des marchandises pour une valeur de 66,2 milliards de francs, ce qui par rapport à l’année précédente correspond à une augmentation de 1,3 %. A l’exception du secteur de l’électrotechnique / électronique (–4,4 %), les exportations ont augmenté dans tous les secteurs de production par rapport à 2013. La métallurgie a le plus profité de cette croissance (+3,2 %), suivie de la construction de machines (+2,3 %) et des instruments de précision (+0,2 %). Actuellement, les États-Unis sont de loin le débouché le plus dynamique. Les exportations de la branche MEM à destination de ce marché ont progressé au quatrième trimestre 2014 de 21,5 % par rapport à la même période de l’année précédente. Pour toute l’année, la hausse est de 7,8 %. Les exportations vers l’Asie ont également augmenté de 6,1 % en 2014. Au quatrième trimestre, la croissance était de 6,4 %. Par contre, les exportations à destination de l’Union européenne ont complètement stagné en 2014 (variation 2014: 0,0 % / +1,0 % au quatrième trimestre.).
 

Entrée des commandes durant l’année 2014.

 
Effondrement des marges dans les entreprises
L’évolution commerciale dans la branche MEM au deuxième semestre 2014 prête à penser que même si le cours plancher n’avait pas été supprimé, elle aurait rencontré une période de stagnation. «La décision du quinze janvier de la BNS a conduit à un effondrement massif des marges et de nombreuses PME industrielles sont retombées dans la zone déficitaire», affirme Peter Dietrich, directeur de Swissmem. Sur la base d’un cours plancher fiable et à l’aide d’une véritable cure de fitness, les entreprises avaient réussi depuis 2011 à regagner la compétitivité internationale. Pour cela, bien des potentiels d’amélioration d’efficience ont été exploités. Certes, les efforts entrepris par les entreprises n’étaient pas en vain, mais la décision de la BNS a anéanti leurs effets positifs. La lutte pour la compétitivité – et parfois même pour la survie – repart donc à zéro.
La nouvelle réévaluation brutale du franc suisse pèse lourd sur l’ambiance dans les entreprises. Dans le sondage le plus récent des entreprises en janvier 2015 sur les attentes commerciales pour les 12 mois à venir, 48,6 % des entreprises s’attendent à un recul des commandes de l’étranger. Contrairement au sondage effectué en automne 2014, les réponses négatives ont pratiquement triplé. Suite à la brusque réévaluation du franc suisse et à l’incertitude concernant l’avenir des accords bilatéraux et du nombre insuffisant de spécialistes, la place industrielle a considérablement perdu de son attractivité. Ceci influence les décisions d’investissements et pourrait à moyen terme laisser de profondes traces sur le marché du travail.
 
La politique doit impérativement se réorienter
«Les entreprises vont tout entreprendre pour absorber une nouvelle fois le choc de réévaluation supplémentaire du franc suisse», explique Hans Hess, président de Swissmem. Il poursuit sur un ton comminatoire: «Nous exigeons avec insistance que tant la politique que les partenaires sociaux entreprennent tout pour soutenir les entrepreneurs dans leur lutte pour la compétitivité et pour améliorer l’attractivité de la place industrielle suisse». Du point de vue de Swissmem, les points suivants sont essentiels:
L’initiative contre l’immigration de masse doit être mise en pratique de telle sorte que les accords bilatéraux soient maintenus et qu’ainsi l’accès non discriminatoire au marché le plus important soit garanti.
Et Hans Hess de faire une suggestion sur un mode impératif: «Swissmem exige de la part du Conseil fédéral d’aspirer à un accord de libre-échange avec les Etats-Unis et il faut au moins essayer de participer aux négociations qui ont lieu entre l’Union européenne et ce pays». Avec une part à l’exportation de 11,3 %, les Etats-Unis représentent en effet le deuxième marché le plus important pour la branche.
Il est important que les entreprises puissent profiter des marges de manœuvre offertes par la CCT de l’industrie MEM. Les tentatives d’obstruction de certains syndicats ne font que torpiller l’attractivité de la place industrielle suisse. En contrepartie, les entreprises doivent aménager leurs mesures de façon socialement supportable. Swissmem s’attend à ce que la Confédération examine des mesures supplémentaires pour encourager l’innovation. Le programme CTI de 2011 a eu des effets tout à fait positifs. Une réédition devrait cependant primairement satisfaire les besoins des entreprises et être disponible sur le long terme et faciliter la gestion administrative.
Au cours des dernières années, le cénacle politique n’a pas suffisamment entrepris pour renforcer l’attractivité de la place industrielle suisse et pour diminuer les entraves pour les entreprises. Swissmem réclame avec insistance que la politique établisse des conditions-cadres permettant à la place industrielle suisse de regagner son attractivité et donc redonner confiance aux entreprises qu’elles peuvent rester compétitives à long terme au niveau international sans devoir quitter la Suisse.