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18 mars 2018 | La Revue POLYTECHNIQUE 03/2018 | Énergie

Une brique isolante dotée de bulles microscopiques

Une meilleure isolation thermique permet de réduire les coûts de chauffage, mais cela ne doit pas se faire au détriment d’une architecture attrayante. Un nouveau type de briques remplies d’aérogel pourrait permettre à l’avenir, de construire des parois minces très isolantes.
C’est une évidence: mieux un bâtiment est isolé, moins de chaleur est perdue en hiver et moins d’énergie est nécessaire pour atteindre une température ambiante agréable. Il n’est donc pas étonnant que l’Office fédéral de l’énergie augmente régulièrement les exigences en matière d’isolation des bâtiments.
Traditionnellement, les couches isolantes sont appliquées sur les murs finis. On utilise toutefois de plus en plus souvent des briques ayant des propriétés auto-isolantes, ce qui permet d’économiser de l’énergie tout en offrant de nouvelles possibilités architecturales.
 
La brique Aerobrick remplie d’aérogel.
 
 
Un compromis entre les propriétés mécaniques et thermiques
Les briques isolantes offrent un compromis exploitable entre les propriétés mécaniques et thermiques. Déjà disponibles sur le marché dans de nombreuses variantes, elles conviennent également aux bâtiments à plusieurs étages. Certaines sont pourvues de nombreuses chambres à air, d’autres de cavités plus grandes remplies de matériaux isolants, tels que la perlite, la laine minérale ou le polystyrène. Leur conductivité thermique diffère selon la structure et le matériau de remplissage. Afin d’isoler les murs ainsi que ceux dotés de couches isolantes séparées, les briques isolantes sont généralement plus épaisses que les briques traditionnelles.

L’aérogel au lieu de la perlite
Les chercheurs de l’Empa ont remplacé la perlite par de l’aérogel dans les briques isolantes. Ce matériau très poreux possède des propriétés d’isolation thermique très élevées et résiste à des températures allant jusqu’ à 300 °C. Ce n’est pas un matériau inconnu pour les chercheurs: ils ont déjà mis au point un enduit isolant performant qui permet, notamment, de rénover les bâtiments historiques et de ne pas altérer leur aspect.
Jannis Wernery, un chercheur de l’Empa et collaborateur du bureau d’études «Matériaux et composants énergétiques pour le bâtiment», a mis au point, avec ses collègues, un mélange pâteux de particules d’aérogel destiné à être utilisé comme matériau de charge pour la brique. «Le matériau peut facilement être rempli dans les cavités et se mélange ensuite à l’argile des briques», explique Jannis Wernery. L’«Aerobrick» est née.

 
Pour obtenir les mêmes valeurs d’isolation qu’un mur d’Aerobricks de 165 mm d’épaisseur, un mur de briques en perlite doit avoir une épaisseur de 263 mm et un mur de briques non isolantes, de 1240 mm.
 
 

Construire des murs plus minces
Une comparaison à l’aide d’un appareil de mesure de conductivité thermique, effectuée à une température moyenne de 10 °C, montre que les briques remplies de perlite, de mêmes structure et épaisseur, isolent d’environ un tiers moins bien que la brique aérobie. En d’autres termes, pour obtenir les valeurs d’isolation requises, un mur en brique de perlite doit être environ 35 % plus épais qu’un mur en briques aérobies.
Plus impressionnante encore est la comparaison avec les briques ordinaires en briques non isolantes. Celles-ci conduisent la chaleur jusqu’ à huit fois mieux. Un mur conventionnel devrait donc avoir une épaisseur de près de 2 m pour pouvoir bien isoler, un mur en briques aérobies de seulement 20 cm. Avec une conductivité thermique mesurée de seulement 59 mW/m2, l’Aerobrick est actuellement la meilleure brique isolante.
Toutefois, aujourd’hui et même demain, personne ne pourra probablement construire une nouvelle maison en briques aérodynamiques; le matériau de remplissage est encore trop cher. Jannis Wernery a calculé qu’au prix du marché actuel de l’aérogel, un seul mètre carré de maçonnerie coûterait environ 500 francs de plus. Cependant, les experts supposent que les coûts de l’aérogel vont baisser considérablement à court et moyen terme, si bien que rien ne s’opposera à l’utilisation de cette brique miracle.

Bibliographie
Aerobrick — An aerogel-filled insulating brick, J. Wernery, A. Ben-Ishai, B. Binder et S. Brunner, Energy Procedia, vol. 134, p. 490–498, oct. 2017, DOI: 10.1016/j.egypro.2017.09.607

 
Les aérogels
En tant que matériaux isolants dans le secteur du bâtiment, les aérogels sont un développement relativement récent. Principalement à base de silicates, ils sont composés, en volume, de plus de 90 % de pores remplis d’air, avec des tailles dans la gamme nanométrique. Cette caractéristique minimise le transfert d’énergie par le mouvement des molécules d’air. En d’autres termes, les aérogels sont des matériaux isolants très efficaces. En plus de leurs propriétés thermiques, les aérogels sont perméables à la vapeur d’eau, n’absorbent pratiquement aucune humidité, sont recyclables, non toxiques et incombustibles, ce qui en fait un matériau d’isolation thermique presque idéal pour les bâtiments.
 

Jannis Wernery
Building Energy Materials and Components
Tél. 058 765 49 46
jannis.wernery@empa.ch