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16 mars 2015 | La Revue POLYTECHNIQUE 01/2015 | Conditionnement

Une météorite martienne contiendrait des traces d’activité biologique

La planète rouge héberge-t-elle ou a-t-elle hébergé des formes de vie? Les entrailles d’une météorite martienne relancent le débat. Une étude internationale, à laquelle a participé l’EPFL, a publié ses conclusions dans la revue Meteoritics and Planetary Sciences.
«Jusqu’ici, aucune autre explication ne nous convainc davantage.» Philippe Gillet, directeur du Laboratoire des sciences de la Terre et des planètes de l’EPFL, et ses collègues d’une équipe internationale (Chine, Japon et Allemagne) ont analysé minutieusement des traces de carbone trouvées à l’intérieur d’une météorite martienne. Leurs résultats plaident pour une origine biologique de ces inclusions. Celles-ci feraient suite à l’infiltration d’un liquide riche en matière organique dans les fissures de la roche, lorsque celle-ci était encore sur la Planète rouge. L’étude est publiée dans Meteoritics and Planetary Sciences.
 
La météorite martienne qui contiendrait

des traces d’activité biologique.

 
Des cavités remplies de matière carbonée
Ejectée de la planète Mars par l’impact d’un astéroïde, la roche martienne a fini sa course sur la Terre. Tombée dans le désert du Maroc le 18 juillet 2011, sous les yeux de plusieurs témoins, la météorite Tissint présente des cavités remplies de matière carbonée. Plusieurs équipes de recherche ont d’ores et déjà pu démontrer que cette météorite venait de Mars et que ce composant était de nature organique. Le débat reste toutefois ouvert sur l’origine de ce carbone.
 
Du carbone qui pourrait être d’origine biologique
Des analyses chimiques, isotopiques et au microscope de cette matière carbonée ont conduit les chercheurs à plusieurs conclusions. Ils ont pu clairement exclure une éventuelle origine terrestre, en montrant notamment que ces inclusions avaient été piégées dans la météorite avant qu’elle soit éjectée de Mars en direction de la Terre.
Mais surtout, les chercheurs ont remis en cause des conclusions antérieures (Steele et al., Science, 2012), qui expliquaient que le composé organique pouvait provenir de la cristallisation à très haute température d’un magma. Or, selon ce travail, il est plus probable que cette matière, de type kérogène, ait été déposée à basse température dans ces fissures près de la surface de Mars, par infiltration d’un liquide riche en composés organiques. Un phénomène qui s’est produit dans les couches superficielles de la planète rouge.
 
Des conclusions bien étayées
Ces conclusions sont étayées par plusieurs propriétés de la matière carbonée présente dans la météorite. Par exemple, le taux particulièrement bas d’un isotope de carbone (13C). Cette dernière valeur est nettement inférieure au taux de 13C rencontré dans le CO2de l’atmosphère martienne, mesuré par les sondes Phoenix et Curiosity. Or cette différence correspond très exactement à celle que l’on peut observer sur Terre entre un morceau de charbon d’origine biologique et le carbone de l’atmosphère. Les auteurs notent aussi que cette matière organique aurait pu être apportée sur Mars par la chute de météorites très primitives, les chondrites carbonées. Mais selon eux ce scénario est peu plausible, en raison des faibles concentrations de matière organique dans ces dernières.
«Il est délicat d’asséner des certitudes, surtout dans un domaine aussi sensible», prévient Philippe Gillet. «Je suis ouvert à ce que d’autres études viennent nous contredire. Mais nos conclusions sont toutefois de nature à relancer activement le débat consacré à l’existence possible d’une activité biologique sur Mars, du moins dans le passé», ajoute le chercheur.
 
Source:
Lin Yangtin et al., Nanosims analysis of organic carbon from the Tissint Martian meteorite: Evidence for the past existence of subsurface organic-bearing fluids on Mars, Meteoritics and Planetary Sciences, décembre 2014, DOI: 10.1111/maps.12389
 
Pour plus d’informations:
Dessin animé d’explication (en anglais): http://youtu.bejcCOQxlo7i2E
Interview de Philippe Gillet (en anglais): http://youtu.bejGdJ2Uzs LOo

 
Prof. Philippe Gillet
Laboratoire des sciences de la Terre et des planètes
EPFL
philippe.gillet@epfl.ch
 
Yangtin Lin
Beijing NanoSIMS Lab, lnstitute of Geology and Geophysics
Chinese Academy of Science
Iinyt@mail.iggcas.ac.cn
Tél.: +86 10-82998413